Avec un décret daté du 23 décembre 2006, vient de sortir le dernier avatar des mesures relatives aux publicités et autres imprimés non adressés…c’est à dire imposés à nos boîtes aux lettres, que nous en voulions ou pas. Ainsi, en faisant, à travers le prix des produits, supporter les coûts de traitement de ces publicités à tous les consommateurs (même ceux refusant de recevoir des publicités dans leur boîte aux lettres), ce nouveau système est biaisé.
Le texte fixe à 65 euros par tonne le soutien accordé aux collectivités locales, pour les déchets d’imprimés qu’elles feraient recycler. Et ce sera 30 € pour un traitement thermique avec valorisation d’énergie (en fait une incinération, sans exigence d’efficacité énergétique… « ♪♫♪♪ laissez brûler les p’tits papiers » !).
Après les emballages, piles, appareils électriques et électroniques…c’est l’application apparente de ce qu’on appelle la R.E.P. (responsabilité élargie des producteurs). Un excellent système dans son principe, puisqu’il oblige les entreprises à organiser et financer le traitement des déchets issus des produits qu’elles mettent sur le marché. Même si, en réalité, ce financement reste partiel, on pourrait donc se réjouir de l’aide apportée aux collectivités qui doivent traiter, chaque année, 40 kg par foyer de ces courriers non adressés.
Toutefois, les entreprises répercutant, fort logiquement, ces charges dans le prix des produits, le véritable intérêt de la R.E.P. devrait être d’induire des changements de conception et d’achat : le consommateur donnant sa préférence aux produits les moins affectés financièrement, parce que générant moins de déchets et plus facilement recyclables…et les entreprises cherchant à améliorer leurs produits dans ce sens. Voilà qui serait de la prévention des déchets et une véritable démarche de développement durable !
Et c’est là que le bât blesse avec nos publicités et imprimés : plutôt que des produits acquis de façon délibérée, moyennant un certain prix, il s’agit d’accessoires du marketing imposés au consommateur. Ce sont les prix de tous les autres produits qui vont indistinctement supporter le coût de traitement des prospectus. Ceux qui les tolèrent dans leur boîte aux lettres, n’y trouveront peut-être rien à redire. Il n’en est pas de même des autres, ceux qui ont posé un autocollant STOP PUB, qui se démènent pour qu’il soit respecté et qui contribuent ainsi activement à l’évitement d’une partie des 40 kg cités plus haut…On peut imaginer leur tête lorsqu’ils comprendront qu’en plus, ils payent quand même pour ces prospectus !
Ainsi proposé sans transparence, sans lien avec l’opération STOP PUB, sans que celle-ci soit dotée d’une légitimité réglementaire (obliger au respect de la volonté exprimée par l’autocollant), ce dispositif est contre productif, tant pour notre environnement qu’en terme de liberté du citoyen. Il risque même de décrédibiliser des mécanismes financiers, qui pourraient être vertueux, si on leur faisait jouer véritablement leur rôle au lieu de les réduire à de simples droits à payer (un petit peu) pour continuer à gaspiller (beaucoup).
Le slogan de la campagne officielle est « réduisons vite nos poubelles, ça déborde ! ». Il est donc temps de comprendre que financer, très partiellement et de manière obscure, l’élimination de nos déchets ne mettra aucun frein véritable au débordement ! Pour la fédération France Nature Environnement, la réglementation et le dispositif Eco-folio s’arrêtent au milieu du gué…et ne font qu’entériner une logique de gaspillage sans avenir.