La filière Bio vient de faire condamner l’Etat Français pour non transposition de la Directive européenne sur la dissémination des OGM dans l’environnement. Dans le même temps, la loi "enfin" adoptée par le Parlement la semaine dernière ne mettra nullement fin à ses craintes de contamination ni à sa revendication d’une indemnisation dès la moindre trace d’OGM décelée dans ses produits.
8 organisations Bio françaises* avaient engagé un contentieux contre l’Etat français pour dénoncer la non-transposition de la Directive n° 2001/18 relative à la dissémination des OGM dans l’environnement. Cette directive devait être transposée au plus tard en octobre 2002. Le Tribunal administratif de Paris, dans un jugement rendu le 16 mai dernier, condamne l’Etat à verser aux organisations Bio un euro symbolique en réparation du préjudice subi.
Le tribunal a jugé que le droit français était insuffisant sur plusieurs points : évaluation des effets sanitaires et environnementaux des OGM, surveillance des cultures, consultation du public, information sur la localisation des parcelles et transparence des informations fournies par les semenciers.
Cette condamnation explicite de l’Etat est une reconnaissance du risque que font courir les cultures d’OGM à l’Agriculture Biologique. L’adoption définitive de la loi sur les organismes génétiquement modifiés par le Sénat le 22 mai prétend mettre fin à ce risque. Or, elle constitue une grave menace contre la liberté des agriculteurs et des consommateurs de produire et de consommer sans OGM. Cette loi fixe en effet des règles insuffisantes en matière de "coexistence" des cultures et en termes de responsabilité en cas de dommages causés aux filières non-OGM et/ou à l’environnement. Elle ouvre la porte à une tromperie légale du consommateur obligé d’acheter des produits contenant un peu d’OGM sans qu’il en soit averti. La reconnaissance législative d’un seuil de 0,9% de contamination acceptable est fermement condamnée par la filière Bio française et prouve bien l’impossible coexistence des OGM et de l’Agriculture Biologique. Cette loi ne prévoit en outre aucune représentation d !
e la filière "Agriculture Biologique" au sein du Haut conseil des biotechnologies.
Si la page parlementaire est donc pour l’instant tournée, le débat est loin d’être clos. En effet, un recours a été déposé par un groupe de parlementaires ce mardi 27 mai devant le Conseil constitutionnel pour lui demander de censurer ce texte. "En légalisant les OGM sans définir de seuil, en prenant le risque qu’ils contaminent l’ensemble des productions agricoles, le gouvernement a porté atteinte au principe de précaution reconnu dans la Constitution et à la Charte de l’environnement qui lui est adossée. Son projet de loi doit être censuré à ce titre", déclarent les auteurs de la saisine dans un communiqué. Ils ajoutent : "C’est la première fois que le Conseil Constitutionnel statuera sur ce principe de précaution. Sa décision ouvrira la voie à une jurisprudence environnementale aux conséquences majeures pour le respect des ressources naturelles".
De son côté, le collectif anti-OGM promet la poursuite du "combat citoyen".
La filière Bio ne manquera pas non plus de se mobiliser pour défendre le droit de produire et consommer "sans OGM".
*Les 8 organismes ayant engagé la responsabilité de l’Etat sont : Biocoop, DEMETER Franc e, Fédération Nationale d’Agriculture Biologique des régions de France (FNAB), Inter Bio Bretagne, Mouvement de Culture Biodynamique, Nature & Progrès, Syndicat d’Agriculture Biodynamique, SYNABIO.
Après l’adoption définitive de la loi OGM au Sénat le 22 mai, la Fédération nationale d’agriculture biologique des régions de France, qui a fait savoir à maintes reprises tout le mal qu’elle pensait de ce texte, va désormais concentrer ses efforts sur les éventuels décrets d’application, la protection de la filière biologique, la défense des intérêts des producteurs et consommateurs bio, et les règles européennes en matière d’OGM.
La loi votée refuse le zéro OGM, seule mesure capable d’arrêter la pollution massive programmée. Il faudra donc faire entendre la demande des bio de pouvoir continuer à produire sans aucune trace d’OGM. La faiblesse d’indemnisation en cas de contamination, le seuil (probable ?) de déclenchement de cette indemnisation à 0,9% de pollution, sa limite à l’année de semis de l’OGM incriminé, et la quasi-impossibilité de ressemer sa propre récolte, sont déjà inscrits comme des moyens de condamner toute culture non-OGM.
A la demande des producteurs, la FNAB travaille désormais à un identifiant pour des pratiques bio supérieures à la réglementation : l’absence totale d’OGM sera parmi les critères centraux de son cahier des charges. Elle sont assurés là -dessus de l’appui de la grande majorité des acteurs de la filière. Elle demandera aux paysans bio et à ceux qui veulent continuer de manger sans OGM de continuer l’action citoyenne afin de renforcer les mesures pratiques de protection contre les transgéniques.
La FNAB sera bien sà »r très attentive à ce que le gouvernement franà§ais présentera en matière de nouvelles règles à Bruxelles concernant les OGM. Elle militera, avec ses partenaires franà§ais et européens, notamment pour le zéro OGM dans les semences, seul moyen de pouvoir tenir le zéro OGM dans les récoltes. Mais la reconnaissance du respect des systèmes agricoles et filières sans OGM dans l’UE, et l’information des consommateurs sur l’alimentation animale doivent être au centre des modifications européennes.