Sorti par la petite porte, le contrôle technique des deux-roues motorisés revient par la fenêtre via la nouvelle
procédure des véhicules endommagés (VE) qui entrera en vigueur le 15 avril 2009.
Présentée par le Ministère des transports comme une simple adaptation de l’ancienne procédure VGA
(véhicule gravement accidenté), la procédure VE, au contraire, la transfigure en élargissant considérablement
son champ d’application.
La nouveauté est que tous les véhicules immatriculés seront concernés, y compris les deux-roues motorisés,
alors que la procédure VGA les excluait explicitement.
Le danger réside dans le pouvoir laissé aux forces de l’ordre et aux experts.
Alors que les premières pourront déclencher la procédure non plus seulement à la suite d’un accident de la
circulation mais à tout moment, sur la base d’un soupçon de dangerosité, les seconds, qui sont les seuls à avoir
été consultés sur la mise en place de cette nouvelle réglementation, pourront déclencher directement la
procédure lorsqu’ils seront missionnés par un assureur à la suite d’un accident ou de tout autre sinistre (retour
de vol, dégât suite à intempérie).
La dangerosité d’un véhicule sera estimée, visuellement, au regard d’une liste de 21 critères identiques à toutes
les catégories de véhicule, de la moto aux poids lourds.
Qu’elle soit alors soupçonnée ou avérée, elle emportera les mêmes conséquences : l’usager se retrouvera à
pied, avec une lourde facture en poche.
Si l’objectif de retirer de la circulation les véhicules dangereux rallie tous les suffrages, cette réglementation
dépasse largement ses enjeux. Rappelons que selon l’étude MAIDS, seul 0,74% des accidents impliquant un
deux-roues motorisé est lié à un mauvais entretien du véhicule. A l’inverse, elle coïncide parfaitement avec la
volonté du gouvernement de mettre en place un contrôle technique. Car une fois la procédure enclenchée,
l’expert ne pourra autoriser la remise en circulation du véhicule qu’après s’être assuré qu’il n’a pas subi de
transformations. L’objectif initial de la procédure est alors complètement biaisé puisqu’il ne s’agit plus d’éviter
un danger dans la circulation mais de faire la chasse à la personnalisation des véhicules.
Pour compenser les incohérences de cette réglementation, le ministère des transports assure qu’elle sera
appliquée avec « discernement ». C’est un peu léger quand on voit comment ce même « discernement » est
appliqué en matière de stationnement ou de remontée de files.
Au final, c’est un chèque en blanc que les professionnels, assureurs et usagers doivent signer à la Direction de
la Sécurité et de la Circulation Routières (DSCR) qui leur a présenté cette nouvelle procédure trois semaines
avant son entrée en vigueur, alors qu’elle patiente dans ses tiroirs depuis six ans !
La Fédération Française des Motards en Colère (FFMC), l’Assurance Mutuelle Des Motards (AMDM), la
branche deux roues du Conseil National des Professionnels de l’Automobile (CNPA), et la Fédération
Française de Motocyclisme (FFM) refusent de laisser planer cette épée de Damoclès au dessus de la tête des
usagers et de leur portefeuille.
Elles demandent que seuls les experts, formés aux spécificités des deux-roues motorisés, puissent déclencher
une procédure VE et que leur contrôle sur le suivi des travaux soit circonscrit aux éléments de sécurité qui ont
motivé la procédure. Elles demandent également l’ouverture d’un moratoire de trois ans pour revoir
précisément, avec tous les acteurs concernés, les conditions de déclenchement et de suivi de la procédure VE
pour les adapter aux deux-roues motorisés.