Elle imaginait "un monde où chacun retrouve la liberté de conduire son destin et participe à l’économie de son environnement" (Patrice Sauvage, fondateur de l’ALDEA).
Pour réaliser une partie de ses ambitions, l’ALDEA se dota après quelques hésitations de l’outil le plus adapté à l’économie alternative et solidaire : le club Cigales (Club d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne Solidaire) bâti sur l’indivision volontaire et le club d’investisseurs. Ce dernier :
Est plus petit qu’un fonds commun de placement à risque ou une SICAV et permet d’organiser des circuits économiques courts
Est très proche de la démocratie locale (un homme une voix, quelle que soit la quantité apportée par chaque membre dans le club)
Permet de faire partie prenante du capital de l’entreprise qu’on soutient contrairement au prêt et donc de s’investir davantage.
C’est le 14 juillet 1983, date qui a son importance pour un mouvement citoyen comme l’ALDEA, que naîtra la première cigales. Ainsi le petit financier qu’allait devenir le club cigales prend-il une tournure humoristique par rapport à la fable.
Le développement des cigales est assez lent les deux premières années avec la création seulement d’une dizaine de clubs avec les ressources financières et les forces de l’ALDEA qui ne fera qu’un, à cette époque avec les cigales.
Le mouvement prendra réellement son essor en 1985 avec la mise en place d’une action de développement.
L’objectif de cette action : atteindre le seuil des 100 cigales afin d’organiser le forum des 100 et ainsi médiatiser les actions d’économie solidaire. Mais ce forum (février 1988) , s’il est probant sur le plan statistique (98 cigales présentes ayant financé 53 entreprises sur 44 départements) est un gouffre financier.
La création de clubs a tout prix a abouti à la séparation totale entre l’ALDEA et la Fédération, à la diminution en flèche du nombre de clubs et à la crise financière de la fédération.
Cependant cet accident de parcours a permis aux cigales de créer une assise territoriale et nationale et de passer d’une initiative à un mouvement. Au pire de la crise, le nombre de clubs n’est jamais tombé en dessous de 60.
En même temps naissent les associations territoriales qui vont accompagner les clubs au niveau régional et être relais de la fédération. Ce pilotage à plusieurs permet l’assainissement de la situation de crise et la stabilisation du mouvement cigales.
Une politique de communication commence à se structurer avec la publication trimestrielle l’Echo des cigales, un maillage entre les différents acteurs du mouvement au niveau national, et une médiatisation croissante.
En même temps, la bourse aux projets parisienne mise en place en 1993 voit de plus en plus de succès. Elle facilite la mise en relation entre les différentes cigales franciliennes et entre les entreprises.
Mais de la logique de mini-révolution alternative, beaucoup de cigaliers sont passés à la logique solidaire d’insertion en période de chômage. À une recherche de l’alternative s’est ajouté le pragmatisme d’une nouvelle génération de cigaliers qui veulent suppléer l’immobilisme des banquiers trop occupés par les marchés monétaires et immobiliers pour s’intéresser au secteur productif.
En plus de ces différents courants d’idées, la fédération entame une ouverture sur d’autres réseaux comme l’APCE (Agence Nationale Pour la Création d’Entreprise), la NEF (Nouvelle Economie Fraternelle), France Active, les SCOP et notamment le REAS (Réseau de l’Economie Alternative et Solidaire issu de l’ALDEA entre autres) disparu en 1999.
Aujourd’hui le réseau compte 110 clubs et plus de 1500 membres.