En effet, les CE ont dû définir et mettre en oeuvre de nouvelles relations avec leurs clients devenus sociétaires. De plus, contrairement aux autres banques coopératives, dans les CE, le sociétariat est postérieur à la création de la banque. A la relation « client » est venue s’ajouter l’identité « sociétaire » que les CE ont développée donnant concrètement sens à la notion coopérative de double qualité « client-sociétaire ». La gestion d’un compte-courant ou d’un prêt immobilier est enrichie maintenant par une mission d’information, de formation, d’écoute des sociétaires. Maurice Bénusilho, directeur de la Fédération nationale des Caisses d’Epargne, voit dans le statut coopératif une modalité originale pour conforter les relations des CE avec son environnement socioéconomique. Les élus jouent dans cette modalité un rôle important en tant que reflet de cet environnement et de moyen d’écoute des sociétaires-clients. Les CE souhaitent densifier les relations avec les sociétaires pour faire en sorte de ne pas la limiter au versement d’un intérêt. Pour ce faire, les CE avec l’appui de la FNCE, mettent en place une politique proactive de sensibilisation des sociétaires et de formation des élus. Ainsi, de nombreuses actions vont être mises en oeuvre comme la création de points « sociétaires » dans les agences ou bien encore de clubs de sociétaires. L’objectif est d’accroître leur sentiment d’appartenance. Mais pour mener à bien cette politique, il est nécessaire de connaître les sociétaires. Les Assemblées générales locales ne réunissant que peu de sociétaires, il s’est donc avéré nécessaire de créer un outil qui permette de faire vivre plus profondément cette relation, en fonction de leurs attentes.
Qui sont les sociétaires des CE ?
La FNCE et les CE ont donc créé l’Observatoire du sociétariat, outil d’analyse des attentes et des besoins des sociétaires. Cet outil permet également d’évaluer, entre autres, la perception que les sociétaires ont de leur rôle, des actions menées par les CE, de leurs relations avec la coopérative et leurs souhaits d’investissement. Dans le cadre de cet observatoire, les CE ont aussi créé un outil de veille sociétale baptisé Sociétalia, constitué par un corpus d’études, de sondages d’opinion et d’instruments de mesure. Ces différents outils permettent également de connaître la composition du sociétariat et le profil des élus. Ainsi, ces études montrent que la parité est bien respectée au sein du sociétariat alors que 80 % des élus sont des hommes. L’ancrage local des CE se retrouvent bien évidement dans les chiffres avec 64 % des sociétaires vivant dans une commune rurale ou dans une ville de moins de 20 000 habitants. 75 % des personnes interrogées sont clientes depuis 20 ans ou depuis toujours des Caisses d’Epargne.
Alors que les CE sont des acteurs importants sur le marché des associations, seulement 28 % des sociétaires ont un engagement associatif. Parmi les élus, ils sont 60 % à être engagés dans le monde associatif.
L’étude a montré également que le sociétariat des CE est constitué d’une population hétérogène constituée de 3 segments : les spectateurs, les motivables et les motivés. Le spectateur, 69 % des sociétaires, se comporte comme actionnaire recherchant le versement d’un dividende. Il souhaite également accéder à des services bancaires et à un accueil particuliers. Le motivable lui, 16 % des sociétaires, met moins en avant l’intérêt financier lié à l’acquisition de parts sociales et montre un intérêt à s’impliquer dans la vie de la CE. Les motivés eux sont plus sociétaires que clients dans leurs attentes, dans leurs souhaits de participation aux actions et à la vie des CE. Ils représentent 15 % des sociétaires, c’est un chiffre important. Mais il est à noter que seulement 1,5 % des sociétaires participe aux AG des sociétés locales d’épargne, il y a donc un grand écart entre le déclaratif et la réalité.
Solidarité et engagement civique
Pour accroître la participation des sociétaires, les Caisses d’Epargne bénéficient d’un outil original que constituent leurs missions d’intérêt général que leur confère la loi de 1999. Les CE, comme le rappelle Nicole Moreau, Présidente de la FNCE, sont la seule banque en Europe à s’être vue confier, par loi, des missions d’intérêt général. En particulier, elles doivent contribuer au financement de projets d’économie locale et sociale (PELS). Une des deux orientations retenues pour les PELS est la solidarité par l’engagement social et civique. 20 % des sociétaires interrogés ont indiqué leur souhait de s’impliquer dans les actions à caractère social conduites par les CE. Ce qui représenterait 600 000 personnes prêtes à s’engager. Les PELS pourraient ainsi permettre aux CE de développer une troisième relation avec leurs sociétaires s’ajoutant à celles de client ayant des besoins en termes de produits bancaires et financiers et de sociétaire avec des droits d’information, de contrôle et d’administration. Les sociétaires seraient ainsi des acteurs participant à certaines actions de la banque. Face au problème, rencontré par l’ensemble des entreprises d’économie sociale, participation insuffisante aux Assemblées générales, les CE semblent avoir trouver un outil intéressant d’appropriation des valeurs et de participation des sociétaires à la vie de la coopérative. Il pourrait également attirer les jeunes, qui jusqu’à présent restent très peu impliqués et leur permettre de passer à l’acte. Cet outil reste encore toutefois à mettre concrètement en oeuvre.
Des engagements pour l’environnement
Certaines entreprises, les pouvoirs publics et les populations sont de plus en plus préoccupés par les problématiques environnementales et du développement durable. Le Groupe Caisse d’Epargne et le WWF viennent de signer un partenariat portant sur une meilleure prise en compte de l’environnement au quotidien et dans les métiers de la banque. Cet accord s’articule autour de trois axes principaux. Tout d’abord, il vise à promouvoir des modes de vie, de production et de consommation durables et responsables auprès des clients et des sociétaires. Le second axe retenu est l’apport de solutions, notamment financières, propres aux métiers de la Caisse d’Epargne. Le dernier axe consiste à faire évoluer les pratiques de gestion des ressources naturelles. Cela concerne plus particulièrement la gestion durable des forêts des CE. Différents outils vont être mis en oeuvre pour concrétiser ce partenariat dans les métiers et les actions des CE. Daniel Richard, président de WWF France y voit le rapprochement de deux utopies, l’utopie industrielle du 19ième siècle des fondateurs de la Caisse d’Epargne et l’utopie environnementale du WWF. Ce partenariat, selon le président du WWF, serait un élément permettant la rénovation des valeurs utopistes des CE de la société industrielle en valeurs environnementales. Ce partenariat avec les CE va donner accès au WWF à un réseau local très important ainsi qu’à de nombreux médias pour sensibiliser les sociétaires aux problèmes d’environnement et les faire agir pour un développement durable.