Nous avons plusieurs fois marqué nos doutes quand à la volonté du Gouvernement d’aller au-delà de la Loi ESS dans le développement d’alternatives au capitalisme financier tel qu’il se développe et de la cogestion avec le MEDEF et certaines organisations syndicales de l’économique et du social.
Une Loi pour solde de tout compte en quelque sorte.
L’affaire du DIP en est une triste illustration.
Le Délai d’Information Préalable (DIP) des salariés en cas de cession d’une entreprise était une des mesures « phares » de la Loi relative à l’ESS. C’était peut être lui faire beaucoup d’honneur, tant les art.18 et 19 (ex-art 11 et 12) étaient appauvris par rapport aux engagements préparatoires : ainsi les mots « coopératives », « scop » qui blessaient la sensibilité patronale (le MEDEF avait parlé de texte anxiogène) ne figuraient-ils pas dans le dernier texte des articles.
Ce DIP était aussi volontiers présenté comme une, timide, reprise de ce qui aurait dû être la loi Florange !
Mais c’était trop encore pour le MEDEF et la CGPME qui, profitant du passage à droite du Sénat, entendaient voir supprimer les deux articles.
Ce qui fut dit fut fait.
Le Gouvernement allait-il faire valoir sa majorité et le dernier mot qui constitutionnellement revient à l’Assemblée nationale où il dispose d’une majorité pour ce genre de texte ?
Nous l’avions dit ce serait un marqueur de son engagement en faveur de l’ESS.
Eh bien non ! Selon la vieille stratégie de Clémenceau « quand on veut enterrer un problème on crée une commission », le Gouvernement a confié une mission à une parlementaire de l’Héraut, Madame Dombre-Coste, pour un rapport sur le DIP et les préconisations de ce rapport qui vient d’être rendu « détricotent » la Loi Hamon et rendent le DIP tellement ténu qu’il serait vain de le maintenir.
Bilan : satisfaction dans le Figaro et sur Atlantico, commentaires ironiques du MEDEF mais surtout une nouvelle manifestation de mépris pour les salariés.
Mais il est un autre élément de bilan :
Le silence complet des instances de l’Economie sociale et solidaire sur ce nouveau pas en arrière du Gouvernement dans leur champ.
La jeune, et ambitieuse, CFESS n’a rien dit.
Plus grave la Confédération générale des SCOP n’a émis à ce jour aucun commentaire sur ce recul manifeste salué comme tel par la droite.
On dit ici et là que ces silences pourraient être attribués à une volonté d’entamer des négociations avec les organisations patronales sur représentation et représentativité des employeurs de l’ESS dans le champ du dialogue social et des institutions paritaires.
Mauvais augure que cette volonté de se battre en reculant.
Il faut appeler un chat un chat et le rapport Dombre-Coste une défaite.
Les forces dont l’ESS se revendique, les chiffres qu’elle avance régulièrement (PIB, emploi…) devraient suffire à fonder une attitude ferme et sans équivoque.
Nous constatons tristement que ce n’est pas le cas.