Avec une violence inouïe, le gouvernement vient de décider la suppression de 150 000 emplois aidés dès 2017, et 110 000 supplémentaires en 2018. Compte tenu de la fragilité des associations, beaucoup déboucheront sur des licenciements. Cet immense plan social a été décidé sans aucune concertation et dans une approche strictement comptable. Il témoigne d’une ignorance et d’un mépris de la société civile, qui semble pour le gouvernement se réduire aux start-up et aux entrepreneurs sociaux. Cette décision est catastrophique pour des dizaines, et bientôt des centaines de milliers de salarié.e.s privés d’emploi, pour des milliers de collectivités incapables d’assurer la continuité du service public, pour la survie de milliers d’associations et pour les populations aidées. C’est une atteinte grave à la dignité des personnes, à l’accès au droit, à la solidarité, aux pratiques culturelles, sportives et éducatives, au vivre ensemble.
Les associations ne se définissent pas seulement par un " modèle économique ", mais par un modèle social, démocratique, humain fait d’émancipation, de respect des droits fondamentaux, d’égalité, mais aussi de coopération, de générosité. L’innovation sociale, ce n’est pas l’ubéralisation de la société, mais l’invention sans cesse renouvelée de réponses sur le terrain aux besoins des habitant.e.s et aux aspirations des citoyen.ne.s dans la fraternité. Le retour au XIXe siècle qu’on nous propose est archaïque et invivable.
C’est pourquoi les organisations et les citoyens signataires demandent :
Un moratoire sur la suppression des emplois aidés en 2017-2018, c’est-à-dire de nouvelles instructions à Pôle emploi et aux services déconcentrés de l’État pour renouveler les contrats aidés sur la base des critères de début 2017, sans se limiter à des aménagements à la marge en fonction des protestations ;
Une étude d’impact sérieuse et contradictoire de l’évolution des financements publics aux associations, de leurs effets sur la vie citoyenne et les territoires, sur les actions réalisées par les associations au service de l’intérêt général et sur les conditions d’emploi dégradées des salarié.es associatifs ;
La mise en place dès le budget 2018 d’une ligne budgétaire dotée de 800 millions d’euros supplémentaires et son attribution déconcentrée aux associations contribuant à l’intérêt général qui en ont le plus besoin [1], employeuses ou non, afin de permettre à ces associations d’assurer la continuité des missions indispensables qu’elles remplissent au service de la société ;
L’ouverture d’une négociation sur l’emploi associatif, afin que les associations puissent, pour leurs missions permanentes au service de l’intérêt général, rémunérer correctement leurs salarié.e.s de façon stable à travers des CDI, tout en maintenant un dispositif adapté de retour à l’emploi.
Les signataires appellent tous les citoyens et toutes les associations à :
Alerter dès maintenant leurs parlementaires, qui vont débattre du budget 2018 au mois de novembre, avec les syndicats de salarié.e.s, et chaque fois que c’est possible, avec des collectivités locales citoyennes qui partagent les mêmes préoccupations ;
Faire du mercredi 18 octobre, jour du " forum national des associations et fondations ", une journée noire pour les associations partout en France, sous la forme de leur choix, en s’habillant de noir pour symboliser leur mort programmée, en portant un brassard " en grève ", ou par toute autre action symbolique, festive, protestatrice…
Ces actions constituent une première étape. D’autres actions communes pourront être envisagées au mois de novembre, notamment après les rassemblements qui se multiplient du niveau local au régional [2].
Premiers signataires
Organisations : CAC (Collectif des Associations citoyennes / Syndicat Asso -Solidaires / Syndicat de l’éducation populaire UNSA / Collectif Pas Sans Nous / FSGT (fédération sportive et gymnique du travail) / Peuple et Culture / UFISC (Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles) / ATTAC / Fraternité France / Genepi /France Terre d’Asile / Le Planning familial MFPF / ACEPP (Association des collectifs enfants parents professionnels-crèches parentales) / RITIMO / Fédération française des écoles de cirque / Collectif pour une éthique en travail social / OPALE / SMA (Syndicat des Musiques Actuelles) / Réseau Féministe Ruptures / FEDELIMA (Fédération de lieux de musiques actuelles) / FAMDT (Fédération des associations de musique et danse traditionnelles) / Association de Défense des Services Publics et de leurs usagers (05) / COPAF (Collectif pour l’avenir des foyers) / APICED Paris 11ème / FERAROCK / Fédération des arts de la rue / REFER (réseau francilien des ressources) / Terrain d’entente Saint-Etienne (pédagogie sociale) / FRMJC Pays de la Loire / Actes If / T’OP ! Théâtre de l’Opprimé Lille
Personnes : Jean-Claude BOUAL, Président du CAC / Patrick VIVERET, philosophe, animateur d’associations / Julien BAYOU, Conseiller régional Ile de France EELV / Eric COQUEREL, Député France Insoumise, coordinateur du Parti de Gauche / Marie-Hélène BACQUÉ, Professeure en études urbaines Nanterre / Alain DETOLLE, Maison interassociative de Millevaches / Didier MINOT, CAC / Nicole PICQUART, CNLRQ (Comité National de Liaison des Régies de quartiers) / Irena HAVLICEK, AMIS Malakoff / Paul ROBERT-KEROUEDAN, Fédération Régionale pour la Culture et le Patrimoine Maritimes en Bretagne / Monique TILHOU, Université Populaire du Saumurois / Anne-Françoise TAISNE, CFSI (Comité français pour la solidarité internationale) / Gilles ROUBY, FRMJC Pays de la Loire / Christine TOME, C’faire Nîmes / Dominique JAULMES, CASP / Marie-Dominique CALCA, Ethnologue, CAC / Bernard MASSERA, Centre social Accueil Goutte d’Or / Francis LE HERISSE, MIDAF / Julie BABAAMMI - DE SOUSA, SEP-UNSA / Christophe MORVAN, Sciences citoyennes / Danielle SIMONET, Conseillère de Paris, coordinatrice du Parti de Gauche / Bernard VACHERON, CAC / Elisabeth MONNERAT, ANPAEJ / Jean-Francois MARTEL, T’OP ! Théâtre de l’Opprimé
[1] Correspondant à 5% du montant des subventions publiques aux associations. Emmanuel Macron lui-même semble indiquer dans ses déclarations au Point que les tâches réalisées par les associations à travers les emplois aidés sont nécessaires, mais devraient être financées par des subventions.
[2] Beaucoup commencent à le faire, en Auvergne-Rhône Alpes, Cornouaille, Rennes, Nantes, Ile de France, Creuse, Saint-Denis, etc.