Le CICE ou l’inégalité de traitement en actes

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Le CICE ou l'inégalité de traitement en actes

D’un côté, on ne peut que se féliciter de la mise en place d’un Ministère délégué à l’Economie
sociale et solidaire et à la consommation, rattaché au Ministère de l’Economie ; enfin une vraie
reconnaissance de notre secteur, tant sur le plan économique que social, avec une identité et des
valeurs qui lui sont propres.

D’un autre côté, dès qu’il s’agit de réfléchir à des mesures permettant l’amélioration de la
compétitivité des entreprises, on ne peut que déplorer un oubli, pour ne pas dire un mépris, en tout
cas une absence de prise en considération des acteurs associatifs de l’économie sociale.

En effet, le dispositif CICE (Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi) qui vient d’être
adopté par l’Assemblée Nationale dans le cadre du projet de Loi de Finances est pour le moins
offensant à l’égard des acteurs économiques associatifs.

Le CICE prévoit, pour les entreprises privées du secteur lucratif, une possibilité de réduction de
charges équivalente à 4% en 2013 et 6% en 2014 de la masse salariale brute pour tous les salaires
compris entre 1 et 2,5 fois le SMIC ! Il y a donc là une mesure véritablement proportionnelle à la
taille et au volume d’activité de chaque entreprise. La mise en œuvre de cette mesure est prévue
sous forme de crédit d’impôt.

Par contre, les entreprises associatives, non assujetties à l’impôt sur les sociétés et qui paient la taxe
sur les salaires, ne relèvent donc pas du CICE, et devraient « bénéficier », en lot de consolation,
d’un abattement de la taxe sur les salaires qui passerait de 6 000 € actuellement à 20 000 €, soit un
effort de l’Etat de 14 000 € !...

De qui se moque-t-on ?!

La taxe sur les salaires est calculée annuellement, salarié par salarié, avec des taux de 4,25% à
13,6% par tranche de salaire brut. Après calcul de cette taxe pour chaque salarié, on aboutit à un
total dont chaque entreprise doit s’acquitter. Et c’est sur ce total, quel qu’il soit, que s’applique
l’abattement fixe de 20 000 € qui est donc identique pour toutes les entreprises associatives de
l’économie sociale, quelle que soient leur taille et leur nombre de salariés !

Pire encore, plus l’entreprise est importante, moins l’impact de la mesure agit sur la compétitivité.

On est donc face à un dispositif dont l’effet est strictement inverse pour deux entreprises de même
taille, dans le même secteur d’activité, selon que l’une est dans le secteur privé lucratif et l’autre
associative dans le secteur privé non lucratif.

Plusieurs de nos adhérents sont dans cette situation, notamment dans les plus grandes régions. On
peut citer l’exemple d’un adhérent qui compte 170 équivalents temps pleins pour une masse
salariale brute de 4 090 000 €. Sa taxe sur les salaires représente 322 230 €, sur laquelle, pour
améliorer sa compétitivité, il devra se satisfaire en 2013 d’un abattement supplémentaire de 14 000€
et en 2014 aussi.

Par contre, une entreprise avec les mêmes caractéristiques dans le secteur lucratif privé, pourra
bénéficier, en 2013, d’un crédit d’impôt de plus de 150 000 € et en 2014 de plus de 220 000 € !
Constat : un écart de 136 000 €, dès 2013, puis de 206 000 € en 2014, au profit des entreprises du
secteur lucratif !

Or, dans notre secteur d’activité, ces deux entreprises soumissionnent aux mêmes appels d’offres
de l’Etat ou des collectivités territoriales. Dans le champ de la Formation Professionnelle, il n’est
pas rare de rencontrer des entreprises associatives de plus de 50 ou 100 salariés et ce phénomène a
plutôt tendance à s’accentuer compte tenu de l’évolution de la commande publique qui suppose,
pour pouvoir répondre aux appels d’offres, une taille et une surface financière importantes, afin de
pouvoir prétendre à une place de mandataire et même de cotraitant au sein d’un groupement.

Ne sommes nous pas là face à une distorsion de la concurrence générée par ce dispositif mis en
place par l’Etat ? Faudra-t-il, le moment venu, faire arbitrer cette situation par les instances ou
juridictions compétentes ?

Au regard du droit communautaire, ce dispositif ne constitue-t-il pas une aide d’Etat servie à une
catégorie d’acteurs économiques ?

Si on se réfère aux chiffres de l’année 2011, publiés par l’observatoire national de l’économie
sociale et solidaire, cette dernière représente 10,3% des effectifs salariés et les Associations
représentent 1 840 864 salariés, soit 8,2% du total des effectifs salariés en France. Ce n’est sans
doute pas suffisant pour être pris en compte comme un acteur économique à part entière...

Puisque le secteur de la Formation Professionnelle est qualifié d’activité économique soumise aux
règles de la libre concurrence, faut-il comprendre que les Entreprises associatives ne peuvent pas
bénéficier de mesures d’Etat destinées à améliorer la compétitivité ?

Nous pensons qu’il sera difficile, dans un avenir proche, pour les acteurs associatifs de la Formation
Professionnelle, d’accepter d’un côté une telle inégalité de traitement par rapport aux entreprises
privées et, de l’autre côté, le nécessaire subventionnement massif, dans des formules édulcorées,
de la plus grande Association de formation pour qu’elle continue d’exister.

De qui se moque-t-on ?

Nous voilà donc contraints, une fois de plus, à une extrême vigilance et à la mobilisation de tous
les moyens nécessaires à la reconnaissance du secteur non marchand et à la défense des intérêts de
nos adhérents.

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