Depuis 2019, chaque 1er mars, tout employeur d’une entreprise d’au moins 50 salariés doit publier sur son site internet ou transmettre à ses salariés, son index de l’égalité professionnelle avec les notes qui le composent. Ces informations sont également transmises au comité social et économique et à l’inspection du travail. Ce nouveau Céreq Bref revient sur chacune des cinq composantes de l’index, à la lumière des entretiens menés auprès d’une quarantaine d’établissements. Si celui-ci est vu comme une avancée dans le combat pour l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, les auteurs pointent une construction parfois difficile et un usage inégal par les entreprises.
Un outil de mesure de l’écart salarial « résiduel »
- L’index est pensé comme un outil synthétique mesurant les inégalités salariales résiduelles (après neutralisation du temps de travail et des positionnements professionnels différents) et prenant en compte aussi les augmentations, les promotions et la répartition genrée des plus hauts salaires.
- En 2022, 61 % des entreprises ont publié leur index : 92 % d’entre elles ont un index supérieur à 75, seuil en dessous duquel elles sont dans l’obligation de mettre en place des mesures correctrices dans les trois ans.
Cinq indicateurs pour un index
- Les écarts de rémunération entre hommes et femmes (40 % dans le calcul de l’index) : mesurés sur la base d’une classification en 16 groupes (4 catégories socioprofessionnelles et 4 tranches d’âge), ils peuvent regrouper des métiers très différents et donc non comparables.
- Les écarts d’augmentations individuelles (20 % de l’index) et de promotions (15 % de l’index) sont deux indicateurs qui ont le mérite de corriger en partie la conception statique du premier indicateur. Toutefois le montant des augmentations n’est pas retenu, seul le nombre de personnes promues rentre en ligne de compte.
- Le nombre de salariées augmentées au retour d’un congé maternité constitue le quatrième indicateur (15 % de l’index). Celui-ci exerce un contrôle du respect de la législation qui oblige au rattrapage salarial mais laisse de côté les retards de carrière induits.
- Le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 plus hautes rémunérations est le dernier indicateur retenu (10 % de l’index). Il est souvent très corrélé à la proportion de hauts cadres féminins et sa correction ne peut s’envisager qu’à long terme.
Quatre positionnements observés face à l’index
- Pour un premier groupe d’entreprises, souvent de grande taille et déjà investies dans l’égalité professionnelle, la valeur ajoutée de l’index est limitée mais reconnue. Ce sont les entreprises avec le meilleur index.
- Un deuxième groupe de grandes entreprises reprochent à l’index son incomplétude et imprécision par rapport aux outils maisons préexistants.
- Pour un troisième groupe, qui s’intéressait peu à cette question, l’index constitue un outil de gestion préfigurant une politique de réduction des inégalités.
- Le dernier groupe, rassemblant les plus petites entreprises, n’y voit qu’une tâche supplémentaire administrative à effectuer.
Les auteurs notent, d’une part, que la technicité souvent complexe de cet index limite son appropriation par les représentants du personnel et pourrait conduire à le réduire à un simple outil de pilotage managérial, l’obtention d’une note conforme de 75 imposant une vision restrictive de la politique d’égalité. D’autre part, en se concentrant sur les écarts résiduels au sein des entreprises, l’index contribue à masquer les premiers facteurs d’inégalité que sont les surreprésentations des femmes dans les emplois à temps partiel et parmi les bas salaires.
L’index de l’égalité professionnelle : utile mais imparfait
Benoit Cart, Martine Pernod-Lemattre, Marie-Hélène Toutin
Céreq Bref n°428, 2022, 4p.