Que nous disent les trois premières années de vie active des jeunes immigrés et descendants d’immigrés sortis du système éducatif en 2017 ? Leurs situations ont-elles évolué par rapport à celles de leurs aînés sortis en 2004 ? Pour répondre, Stéphane JUGNOT a mobilisé les enquêtes 2007 et 2020 du dispositif Génération. Il compare quatre groupes de sortants : le groupe de référence qui rassemble les sortants nés en France de parents nés en France (76 %), la deuxième génération originaire d’Afrique composée des sortants nés en France avec un parent au moins né en Afrique (7 %), la deuxième génération originaire d’Europe du Sud constituée des sortants nés en France avec un parent au moins né en Europe du Sud (Espagne, Italie, Portugal) (2,5 %), et la première génération originaire d’Afrique regroupe les sortants nés en Afrique (4%).
La « deuxième génération » originaire d’Afrique réduit son écart de niveau de diplôme et de taux d’emploi
- Les sortants de ce groupe représentent presque 7 % des sortants et environ la moitié des sortants de deuxième génération. Ces proportions sont très proches de celles observées pour la Génération 2004.
- On note une forte réduction des écarts de niveau de diplôme par rapport au groupe de référence. Si en 2004, 31 % sortaient non diplômés du système éducatif contre 15 % pour le groupe de référence, ces proportions sont respectivement de 18 % et 12 % pour la génération 2017. En parallèle, la part des bac + 5 ou plus passe de 5 % à 17 % (10 % à 19 % pour le groupe de référence).
- Par leurs origines sociales et leur lieu de résidence, ils restent plus fragiles sur le marché du travail et leur chance d’être en emploi est inférieure de 15 % à celle du groupe de référence. Mais ici aussi, l’écart se réduit puisqu’il était de 23 % pour la génération 2004.
- De même, leur sentiment d’avoir subi une discrimination passe de 38 % en 2004 à 29 % en 2017.
La « deuxième génération » originaire d’Europe du Sud toujours proche du groupe de référence
- Si en 2004 les jeunes de ce groupe représentaient 4 % de l’ensemble des sortants et 29 % des sortants de deuxième génération, ils ne sont plus en 2017 respectivement que 2,5 % et 19 %.
- Tout comme en 2004, leurs origines sociales sont un peu plus modestes que pour le groupe de référence mais leurs parcours scolaires assez proches.
- Leur taux d’emploi est très légèrement supérieur à celui du groupe de référence 75 % contre 73 %. En 2004, la différence était plus faible et en sens inverse. L’écart est un peu plus conséquent quant à l’accès à l’emploi à durée indéterminée (EDI) en février 2020 (48 % contre 43 % pour le groupe de référence). Il l’est aussi en termes de parcours puisque 36 % ont connu un accès rapide à un EDI durable contre 28 % pour le groupe de référence.
Une première génération originaire d’Afrique très hétérogène
- Les sortants de ce groupe représentent 4 % de l’ensemble des sortants en 2017 (2 % en 2004).
- Si leur performance sur le marché du travail apparaît meilleure que celle des « deuxième génération », cette moyenne masque de grandes disparités entre ceux ayant suivi un cursus dans l’enseignement supérieur après un bac passé à l’étranger et les autres.
- 30 % des immigrés d’Afrique sont des sortants de l’enseignement supérieur et comme 81 % d’entre eux obtiennent un diplôme de niveau bac + 5 ou plus, leurs conditions d’insertion sont même meilleures que celles du groupe de référence.
- Les autres immigrés d’Afrique se rapprochent plus des « deuxième génération » par leurs caractéristiques individuelles et par leurs conditions d’insertion.
L’auteur a simulé plusieurs taux d’emploi en fonction uniquement des caractéristiques individuelles des quatre groupes de sortants. La différence entre ces taux simulés et les taux observés constitue la « part inexpliquée » qui peut provenir en partie de discriminations. Avec le modèle qui utilise le plus de caractéristiques disponibles, pour les « deuxième génération » d’Afrique l’écart est de 3 points, 6 points pour les immigrés d’Afrique sortant de l’enseignement supérieur et 4 points pour les autres immigrés d’Afrique. Seules les « deuxième génération » d’Europe du Sud voient leur taux observé être supérieur au taux attendu. En dépit des obstacles méthodologiques à mesurer très précisément les sources des inégalités, les difficultés sur le marché du travail des immigrés et enfants d’immigrés d’Afrique peuvent donc relever en partie de discriminations.
L’accès à l’emploi des immigrés et enfants d’immigrés de la Génération 2017
Stéphane Jugnot
Céreq Bref n°434, 2022, 4p.