Remettre l’homme au cœur de l’économie. Limiter les écarts de salaire. Refuser le diktat de la performance. Encourager le développement durable... Principes utopistes ? Vœux pieux ? Bien au contraire. La crise économique et financière remet sous les feux de la rampe ceux qui cherchent une autre manière de faire de l’économie. Première candidate : l’économie sociale et solidaire, dite ESS, s’invite dans les débats pour proposer rien moins qu’une transformation de la société. Derrière ce nom barbare, on trouve des organisations aux statuts juridiques variés – associations, mutuelles, coopératives, entreprises de droit commun – qui interviennent surtout dans le champ des services : santé, éducation, social, environnement... Animées par une même conviction : « Bâtir des projets économiques à forte utilité sociale, en s’appuyant sur un mode de gouvernance démocratique, une mobilisation citoyenne et un territoire », résume Claude Alphandéry, 87 ans, ardent promoteur de l’ESS.
Si avec la crise l’ESS connaît un regain de vitalité, l’idée n’est pas nouvelle. « Elle s’inscrit dans une tradition d’entreprises non capitalistes constituées sur le principe un homme égale une voix », explique le sociologue Jean-Louis Laville, spécialiste du sujet. La première mouture de l’ESS surgit au XIXe siècle, en réaction aux dérives de la révolution industrielle. Coopératives et mutuelles fleurissent alors, bientôt rejointes par des organisations qui produisent des biens et des services à forte utilité sociale, et ont à cœur d’embaucher en priorité des personnes en difficulté. Depuis, l’ESS s’est enrichie d’une troisième branche : l’entrepreneuriat social ou social business à la française. Avec sa star : Muhammed Yunus, Prix Nobel de la paix, promoteur du microcrédit. Ses réussites : Éthiquable, Alter Éco pour le commerce équitable, le groupe SOS pour la réinsertion... Et un objectif : prouver que performances économique et sociale font bon ménage.