A l’heure où le gouvernement s’apprête à déposer un projet de loi sur l’asile et l’immigration, le collectif Faire vivre les places de la République [1] souhaite rappeler un certain nombre de faits et de principes.
Les migrations ont de tout temps façonné l’histoire du monde, spirituelle, économique, culturelle, sociale. Elles ont fait et font notre richesse. Aujourd’hui, l’immigration, contrairement à certaines idées reçues, ne constitue pas un facteur déterminant du chômage de masse. Les migrants occupent souvent des emplois en tension (hôpitaux, EHPAD...) et contribuent au financement de la protection sociale.
Loin de se tarir, l’immigration est appelée à s’accroître. L’aide au développement des pays du tiers‐monde, bien qu’indispensable, n’aura pas d’effet rapide sur les flux migratoires. Il nous faut donc prendre notre part de l’accueil des migrants, avec humanité. La régulation des flux migratoires est nécessaire, mais elle doit s’exercer d’abord au niveau européen. Elle doit respecter le droit fondamental à demander l’asile pour toute personne menacée dans son pays d’origine.
A cet égard, le règlement de Dublin, qui rend le pays d’entrée responsable du traitement des demandes d’asile, s’avère à la fois inopérant et injuste, renvoyant sur la Grèce, l’Italie et l’Espagne une charge insupportable. Tant que ce règlement n’est pas revu, les Etats ne doivent pas appliquer automatiquement la procédure Dublin sans un examen de la situation individuelle des personnes. La « clause discrétionnaire » du règlement leur permet d’ailleurs, sans attendre un délai de six mois, de statuer sur l’examen d’une demande de protection internationale.
Dans le cadre national, la politique d’intégration des immigrés présente un enjeu majeur que le gouvernement semble décidé à prendre en compte. La société civile a su mobiliser des énergies et des compétences considérables en la matière, avec des résultats probants. Les meilleures solutions résulteront d’une coopération active entre la société civile et l’Etat.
Parallèlement, la volonté de maîtrise des flux migratoires ne doit pas aboutir à des situations inhumaines. L’Etat doit être particulièrement attentif à la situation des plus vulnérables, notamment des mineurs.
Ces principes sont‐ils respectés par le projet de loi d’aujourd’hui ? Se fixant comme principaux objectifs d’accélérer le traitement des demandes d’asile et d’accroître l’efficacité des éloignements, il comporte des reculs pour les droits des personnes, avec une baisse inquiétante de plusieurs garanties procédurales pour les demandeurs d’asile. En matière d’éloignement, l’allongement de la durée de rétention, pour une efficacité faible, engendre des risques importants pour les personnes, les effets de l’enfermement se durcissant avec le temps.
Nous pensons donc nécessaire d’infléchir le contenu de ce projet de loi pour qu’il respecte pleinement les droits fondamentaux des migrants présents sur notre sol. Nos organisations appellent toutes les personnes et toutes les organisations qui partagent ce point de vue à entreprendre des démarches, par lettres, courriels, posts sur les réseaux sociaux ou rendez‐vous, auprès de leurs parlementaires qui auront très prochainement à se prononcer sur ce projet de loi et auprès du ministre de l’intérieur.
[1] Ce texte est soutenu par ATD Quart‐monde, la FAGE, la CFDT, les Francas, France Nature Environnement, France Terre d’Asile, la Ligue de l’enseignement, La Mutualité française, le Pacte civique, l’UNSA.