Le 22 novembre 201 6, le Président de l’Assemblée nationale a saisi le Conseil économique social et environnemental (CESE) sur les conditions de mise en place d’un revenu minimum universel garanti qui se substituerait à l’architecture actuelle des minima sociaux. Ce mardi 25 avril 201 7, le CESE a rendu un avis sur cette question. Celui-ci a le mérite de proposer des pistes qui devraient permettre à l’Assemblée nationale d’éclairer sa réflexion sur la clarification et la simplification du système d’accès aux aides.
Au vu de la grande complexité du sujet, on peut regretter que cet avis ait été réalisé dans un délai aussi court, avec si peu de moyens et, de surcroît, dans un contexte politique pré-électoral de suspicion à l’égard des personnes éligibles aux minima sociaux.
Celles-ci, en effet, se voient de plus en plus dénier leur accès à des droits essentiels comme celui à des moyens convenables d’existence . En conséquence, cet avis soulève, certes, des questions importantes mais qui, pour plusieurs, doivent être approfondies, comme en témoigne d’ailleurs la longue listes des études qu’il suggère de mener à bien.
Le Mouvement ATD Quart Monde apprécie que cet avis s’inscrive dans la continuité de la résolution adoptée par le CESE le 1 4 février dernier (1 ) : « 1 987 – 201 7 : poursuivre résolument la lutte contre la grande pauvreté » . Toutefois, il tient à relever ce que l’avis lui-même souligne dans sa première partie : un revenu minimum social garanti ne permet en aucun cas de sortir de la pauvreté s’il ne s’inscrit pas dans une politique globale d’accès aux droits fondamentaux . En effet, selon l’avis, « la précarité financière n’est qu’un aspect de la pauvreté, largement accentuée par les difficultés dans tous les domaines de la vie : accès à l’éducation, au logement, à la santé, aux transports, à l’énergie, à la culture... » Or, la deuxième partie de l’avis, qui présente les recommandations, est essentiellement centrée sur les prestations aux personnes et leur accompagnement, au risque de faire perdre de vue la perspective globale de l’accès de tous aux droits de tous. Le montant socle de 600 euros fixé par l’avis nous semble faible au regard du seuil de pauvreté qui est à 1 008 euros.
L’avis préconise l’attribution, dès 1 8 ans, du revenu minimum social garanti. Comme le CESE, le Mouvement ATD Quart Monde déplore qu’un grand nombre de jeunes majeurs n’aient aucun revenu et soient à la charge de parents eux-mêmes en grande difficulté.
Pour autant, il ne voudrait pas que cette mesure soit adoptée « par défaut », ouvrant ainsi la voie à un engrenage fatal. Depuis des générations, l’Etat et l’ensemble des citoyens tolèrent – avec un fatalisme inacceptable - que des dizaines de milliers de jeunes sortent, chaque année, du système scolaire sans aucune formation pour se lancer dans la vie. Accorder aujourd’hui le revenu minimum social garanti à ces jeunes, dès l’âge de 1 8 ans, c’est prendre le risque de les installer durablement dans une voie parallèle, sauf si, comme le préconise l’avis, sont développés de solides et pérennes dispositifs d’insertion vers l’emploi, avec formation et accompagnement .
Par ailleurs, le Mouvement ATD Quart Monde s’inquiète d’un risque de clivage entre différentes catégories de jeunes, alors que tous, qu’ils sortent de l’Aide Sociale à l’Enfance, qu’ils soient au chômage, en étude, en alternance, etc. ont un même besoin d’une sécurité financière et d’un accompagnement vers l’autonomie. Afin d’éviter la "stigmatisation" de certains jeunes, il faudrait parvenir, à terme, à ce que les nombreux dispositifs de soutien (contrat jeune majeur, RSA, parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi, Fonds d’aide aux jeunes, bourses étudiantes sur critères sociaux...) soient fondés sur un droit "commun" à une sécurité financière
pour tous.