Alors que le projet de loi « en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat » relatifs à l’expérimentation du RSA va être discuté à l’Assemblée nationale le 10 juillet, l’Uniopss alerte les députés sur les écueils à éviter.
L’Uniopss est favorable au RSA comme incitation à la reprise d’emploi, sur la base du principe que chaque heure travaillée doit apporter un supplément de revenu. Cependant, le projet de loi est largement différent du RSA initial[1] qui considérait comme bénéficiaires non seulement les titulaires de minima sociaux mais également les travailleurs pauvres. Or ces derniers sont exclus du projet de loi.
Le projet actuel soulève de sérieuses questions :
Mise à l’écart des travailleurs pauvres : Il y aura une forte inégalité entre les bénéficiaires du RMI ou de l’API qui bénéficieront du complément de revenu et les travailleurs pauvres non bénéficiaires de minima sociaux. Pour le même nombre d’heures travaillées, les revenus des uns vont atteindre le seuil de pauvreté alors que ceux des autres vont rester en dessous.
Non prise en compte des jeunes de moins de 25 ans : Ils ne bénéficient pas du RMI et n’auront donc pas accès au RSA (sauf s’ils sont isolés avec enfants(s)). Or, ils sont de plus en plus nombreux sans soutien familial et réduits à la pauvreté. Cette situation préoccupe les associations qui constatent chaque jour les dégâts parfois irrémédiables causés par cette situation. Ainsi, l’Uniopss demande que soit créé un revenu d’insertion pour eux.
Disparités quant au montant du RSA en fonction du département : Le projet de loi ne précise pas le montant du RSA, ce qui sous-entend qu’il variera selon les départements. Or il y a des départements riches et des départements pauvres. L’Uniopss souhaite au moins que le texte indique une fourchette, garantissant ainsi un barème monétaire.
Non prise en compte des bénéficiaires du RMI qui créent ou reprennent une activité.
Risque de dualisation entre les pauvres : D’un côté, il y aura les pauvres qui travaillent et auront droit à un RMI augmenté, de l’autre ceux qui ne peuvent pas travailler et vont rester au RMI simple. Or, dans leur immense majorité, tous veulent travailler ; s’ils ne le font pas, c’est soit parce qu’ils ne trouvent pas de travail, soit qu’ils ne sont pas en mesure, temporairement ou durablement, de travailler (causes de santé, gardes d’enfants…). La vie a parfois été tellement dure pour certaines personnes qu’elles ne peuvent plus travailler. Doivent-elles pour autant être mises de côté ?
Le fait de mettre en place le RSA ne doit pas conduire à un blocage des revalorisations du RMI et de l’API.
Risque de transformation en « subvention aux entreprises » : Le RSA risque de fonctionner comme une subvention aux entreprises pour augmenter les revenus des bas salaires, notamment s’il devenait pérenne. N’y a-t-il pas danger à les conforter dans une politique de bas salaires ?
Simplification insuffisante des règles d’intéressement : Le système proposé reste trop complexe et peu lisible pour les intéressés et les acteurs sociaux. Pourtant, l’intéressement n’est efficace que s’il est parfaitement lisible et aisément prévisible.
Une évaluation sans les associations de solidarité : L’Uniopss se félicite que des bénéficiaires soient associés à l’évaluation. En revanche, les associations de solidarité ne sont pas prévues dans la composition du comité d’évaluation.
Au-delà du projet, certains experts des affaires sociales préconisent une autre piste permettant d’éviter les inconvénients que présente le RSA : une réforme importante du périmètre de l’assurance chômage et de ses montants. Il s’agit de faire en sorte que le RMI ne soit plus, de fait, le troisième pilier de l’indemnisation chômage, et de revenir à la volonté du Législateur en 1988, qui faisait du RMI le dernier filet de protection sociale pour les personnes les plus éloignées du marché de l’emploi. Ces experts préconisent de mener à bien une telle réforme dans le cadre d’une politique de sécurisation des parcours professionnels.
L’Uniopss demande que, parallèlement à l’expérimentation du RSA, le débat soit ouvert et organisé en France avec les experts des affaires sociales, les partenaires sociaux et les associations de solidarité sur cette autre politique possible. Les trois années de l’expérimentation devraient laisser le temps nécessaire à un large débat, technique et politique.
[1] RSA proposé par la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » de 2005.
Merci de ces compléments d’information.
A bientôt...