Sur cette base, la LDH se développe très vite et est à l’initiative de nombreuses campagnes, notamment, dans les années 1900-1920, en faveur de responsables syndicalistes poursuivis. Elle intègre alors la défense des droits économiques et sociaux à ses objectifs et pose avec vigueur le problème de la justice sociale et des droits des travailleurs.
Au lendemain de la Première guerre mondiale, elle s’efforce de maintenir le dialogue pour préserver la paix, avec les autres ligues européennes, en particulier la ligue allemande et la ligue belge, et c’est avec elles qu’elle crée la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH) en 1922.
Pendant l’entre-deux-guerres, elle est à l’initiative d’une vaste campagne pour la réhabilitation des soldats condamnés à tort par les conseils de guerre pendant le conflit. De nombreuses interventions, pétitions et mobilisations lui permettent d’obtenir, dans de nombreux cas, leur réhabilitation.
Dans les années 30, la Ligue joue un rôle important dans le rassemblement de toutes les forces démocratiques et progressistes dans la lutte contre le fascisme. C’est au siège de la Ligue des droits de l’Homme qu’est signé le Pacte des partis de gauche, syndicats et associations antifascistes, qui fonde le Front populaire en 1935.
À l’initiative de son président, Victor Basch, la LDH est à la pointe de la dénonciation du nazisme et du fascisme en Europe. Mais, elle se trouve profondément divisée face à la menace de guerre et à la politique d’armement. Comme elle l’est aussi sur la question de la colonisation ou face aux procès staliniens que la majorité de sa direction et de ses membres choisissent de ne pas dénoncer par souci d’une alliance large contre le nazisme.
Pendant l’occupation nazie et le régime dictatorial de Vichy, la LDH paie un très lourd tribut : ses locaux sont occupés, toutes ses archives saisies (elle les a enfin récupérées en 2000, après un détour par Moscou, l’armée soviétique les ayant prises aux nazis à Berlin en 1945). Beaucoup de ses cadres participent à la Résistance. À la Libération, le tiers des membres de son comité central est porté disparu : assassinés, morts en déportation ou fusillés. Victor Basch, à plus de quatre-vingt ans, est assassiné en 1944, avec sa femme Ilona, par la milice et les nazis.
Après la guerre, la LDH se reconstitue, très affaiblie, sans beaucoup de soutien des institutions et des forces politiques, et sans renouvellement ni rajeunissement de ses dirigeants. Elle se consacre aux problèmes liés à la décolonisation et aux attitudes répressives et attentatoires aux droits de l’Homme des IVe et Ve Républiques dans les colonies. Depuis la dénonciation de la répression qui suit l’insurrection malgache de 1947 jusqu’à la lutte contre la torture pratiquée par les autorités françaises en Algérie, elle se voue à un combat qui ne cessera qu’après les accords d’Évian de 1962. L’arrivée en son sein de personnalités engagées dans le combat anticolonialiste est pour elle un facteur de renouvellement important.
À partir de 1958, à l’initiative de son nouveau président, Daniel Mayer, elle s’élève de plus en plus contre les pratiques de la Ve République en matière d’institutions et de libertés publiques, même si plusieurs des membres de son comité central sont des personnalités importantes du mouvement gaulliste (René Cassin, Léo Hamon, André Philip).
Autre combat qui favorise sa relance, celui qu’elle mène dans les années 70 pour défendre les libertés dans l’armée (avec la création du collectif Droits et libertés dans l’institution militaire, le DLIM, en 1977), en faveur de réformes législatives pour la liberté de la contraception et de l’avortement, l’abolition de la peine de mort et l’abolition de lois répressives comme la loi dite " Sécurité et liberté ".
Dans les années 80 et 90, la situation faite aux immigrés en France est un souci constant de la Ligue. Elle milite pour l’abolition des lois restrictives les concernant (ordonnance de 1945 sur les étrangers, loi Pasqua, loi Debré…), pour la régularisation de tous les étrangers sans-papiers qui en ont fait la demande dans le cadre de la procédure Chevènement, pour la reconnaissance des diplômes des médecins étrangers, et, depuis 1980, pour le droit de vote des résidents étrangers aux élections locales.
Simultanément, dans un contexte de crise économique et de chômage croissant, elle définit la citoyenneté sociale, pour lutter contre les nouvelles formes de pauvreté, contre les licenciements abusifs, pour le droit au logement et aux soins.
De manière plus générale, la LDH se consacre de manière prioritaire à la lutte contre les discriminations. Elle se préoccupe du danger que représente l’extrême droite en France et en Europe, tandis qu’elle entame avec la FIDH une action vigoureuse contre l’impunité internationale.
Elle entend, avec les autres Ligues européennes et la FIDH, imposer l’inscription de la lutte pour les droits de l’Homme dans les préoccupations de l’Union européenne (d’où la constitution en 2000 de l’Association européenne de défense des droits de l’Homme). Elle est attentive aux problèmes soulevés par les progrès de la science et des nouvelles techniques de communication.
Elle s’est livrée en 1999 et 2000 à une réflexion sur la redéfinition de son rôle aujourd’hui et sur la refonte de son fonctionnement, rendus nécessaires, en particulier, par les nouvelles données de la mondialisation et les évolutions dans l’engagement associatif. C’est une LDH rénovée, aux statuts transformés, qui fait son entrée dans le XXIe siècle.
Les différents présidents de la LDH depuis sa création :
Ludovic Trarieux (1898 - 1903)
Francis de Pressensé (1903 - 1914)
Ferdinand Buisson (1914 - 1926)
Victor Basch (1926 - 1944)
Paul Langevin (1944 -1946)
Sicard de Plauzoles (1946 - 1953)
Emile Kahn (1953 - 1958)
Daniel Mayer (1958 - 1975)
Henri Noguères (1975 - 1984)
Yves Jouffa (1984 - 1991)
Madeleine Rebérioux (1991 - 1995)
Henri Leclerc (1995 - 2000)
Michel Tubiana (depuis 2000)