1/ UNE SITUATION CONJONCTURELLE PREOCCUPANTE
HAUSSE GLOBALE DU CHOMAGE
Fin juin 2003, 2 404 200 demandeurs d’emploi de catégorie 1
Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie 1 augmente de 1,1 % au cours du mois de juin (+ 25 900). La progression du chômage affecte autant les hommes que les femmes ; en revanche, le chômage des jeunes croît plus faiblement (+ 0,6 %). Sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie 1 augmente de 6,3 % (8,5 % pour les hommes et 4,0 % pour les femmes).
Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie 1+ 6 (sont inscrits en catégorie 6 les demandeurs d’emploi ayant exercé une activité occasionnelle ou réduite de plus de 78 heures dans le mois) est également en hausse de 1,1 %. Le chômage de longue durée (demandeurs inscrits depuis au moins un an à l’ANPE) augmente de 0,7 % alors que le nombre de demandeurs d’emploi inscrits depuis plus de trois ans diminue de 0,8 %. Le taux de chômage au sens du BIT est stable ; il s’élève à 9,5 % à la fin du mois de juin 2003. Au cours du mois de juin, 391 200 demandeurs d’emploi se sont inscrits à l’ANPE… Le nombre d’inscriptions à l’ANPE progresse de 8,6 % par rapport au mois précédent. Les entrées faisant suite à un licenciement économique et à une fin de contrat à durée déterminée augmentent respectivement de 17,7 % et 15,2 %. Les premières entrées diminuent (-1,5 %). … et 339 800 en sont sortis Les sorties de l’ANPE sont en baisse de 1,2 % en juin, alors que les reprises d’emploi déclarées sont quasiment stables (+ 0,5 %). Source : statistiques du ministère du travail juin 2003
HAUSSE SPECIFIQUE DU CHOMAGE DES JEUNES
Exemple : Ile-de-France, hausse de 17,7% des demandeurs d’emplois de moins de 25 ans en un an (juin 02 - juin 03). Les jeunes représentent 10% du nombre total de demandeurs d’emploi dans la région, phénomène "sans précédent" les jeunes diplômés sont les premières victimes de la crise, surproduction de diplômés dans le commerce et le marketing notamment. Source INSEE étude sur la conjoncture régionale.
DARES, Premières synthèses, informations, août 2003 n°33.2 :L’opinion des Français sur le chômage et les politiques de l’emploi : le pessimisme s’accentue en 2003
2/ UNE POLITIQUE DE L’EMPLOI QUI PRIORISE LE SECTEUR MARCHAND
Le gouvernement veut répondre à cette conjoncture par une politique essentiellement fiscale : exonérations de charges pour les bas salaires et pour la création d’entreprises, crédit d’impôt avec la prime pour l’emploi. Dès l’été 2002, cette politique a été soutenue au profit du secteur marchand (Contrat-jeune) et poursuivie aujourd’hui avec les Lois sur l’initiative économique et d’orientation pour la ville et la rénovation urbaine. De fait, cette politique de relance de l’emploi par l’exonération fiscale a renié l’apport spécifique des associations dans le cadre des emplois-aidés jugés coûteux, non productifs et aux nombreux effets pervers (pas de vraies opportunités professionnelles, etc.). Depuis lors, à la faveur des revendications associatives, le gouvernement a assoupli sa position sur ce registre (relance des CES et CEC notamment) tout en organisant des mesures de soutien à l’engagement civique dans le monde associatif (CIVIS, Volontariat civil de cohésion sociale). L’emploi associatif n’est toujours pas considéré globalement comme un secteur économique à part entière, mais pour ce qu’il représente : un "sas" vers l’emploi véritable, un outil de conjoncture pour le traitement social du chômage. Aujourd’hui, le Premier ministre appelle les membres de son gouvernement à "trouver des idées pour l’emploi" (Le Figaro 4 septembre), François FILLON, le ministre des Affaires sociales, s’est voulu d’ailleurs rassurant sur la conjoncture : "les statistiques permettent d’espérer un redémarrage de l’emploi dans le premier semestre 2004". Si cette priorité au secteur marchand ne devrait donc pas être remise en cause en 2004, reste à suivre les dispositifs existants pour le monde associatif et à examiner avec attention ceux proposés par le gouvernement.
2.1 UNE SORTIE ACCOMPAGNEE DU DISPOSITIF EMPLOI-JEUNE JUSQU’A QUAND ?
Circulaires du 4 mars et du 10 juillet 2003 : un objectif affiché : offrir une possibilité de pérennisation au plus grand nombre possible de postes créés dans les associations par :
le recueil des dossier employeur pour les postes créés en 2001 et mise en œuvre de l’épargne consolidée (30% des postes créés par générations), le recueil des fiches individuelles jeunes ;
un suivi resserré des conventions par un remplacement contrôlé : exemple : vacance de poste maximum de 2 mois ;
la mise en place ou développement d’un plan régional de professionnalisation avec objectifs quantitatifs d’appui et la mise en place de dispositif locaux d’accompagnement dans chaque département pour mutualiser les informations et les conseils ;
enfin l’organisation d’actions individualisées pour les postes 98 non aidés après 2003 (cf. appui d’une cellule d’animation nationale des acteurs de la formation et de l’emploi).
Ainsi, au 31 mars 2003 : l’administration centrale devait disposer de la communication théorique par les DRTEFP des objectifs départementaux de conventionnement pour les postes créés en 1998 et achevés en 2003 (objectifs nationaux : 30%EC soit 6000 postes aidés / 45%CP soit 8000 postes), et à la fin avril d’une communication des plans d’interventions départementaux qui font ensuite l’objet d’un contrôle de gestion trimestriel à la DGEFP, les plans régionaux font l’objet d’un bilan à douze mois. Un bilan synthétique est attendu pour l’ensemble des postes créés en 98 et traités en 2003. La question est posée : ce schéma sera t-il reproduit pour les postes créés en 99 et traités en 2004.
Tous les textes sur http://www.nsej.travail.gouv.fr/
Le suivi du dispositif d’appui à la professionalisation des emplois-jeunes : http://www.place-publique.fr/portailej/index.html
2.2 UNE MISE EN ŒUVRE ENCORE FLOUE DU CONTRAT JEUNE EN ENTREPRISE
Les six premiers mois de mise en œuvre des Contrats Jeunes en Entreprise Source : Ministère du travail
De l’été 2002 à la fin janvier 2003, 50 000 demandes de conventions de Contrat Jeune en Entreprise (CJE) ont été déposées auprès des ASSEDIC et 45 875 ont d’ores et déjà été traitées. La montée en charge de ce dispositif, destiné à favoriser l’embauche des jeunes peu qualifiés, s’est fortement accélérée à la fin du second semestre de 2002. Plus des deux tiers des recrutements concernent des garçons. Les jeunes femmes sont embauchées majoritairement dans le secteur tertiaire et quatre fois sur dix à temps partiel, contre une fois sur dix pour les jeunes hommes. Trois contrats sur cinq sont conclus par des entreprises de moins de dix personnes. Avant leur entrée dans la mesure, trois jeunes sur dix étaient au chômage et près de six sur dix étaient en emploi : le dispositif, un contrat à durée indéterminée, semble favoriser la sortie de la précarité pour des jeunes faiblement diplômés qui y sont fréquemment confrontés.
Disponible : La publication "premières informations, premières synthèses" consacré à ce sujet (Pdf)
Tous les textes sur http://www.travail.gouv.fr/cje/index.html
2.3 LE CIVIS : QUELLE REALITE EN 2003 ?
Le décret concernant le troisième volet du contrat d’insertion dans la vie sociale (Civis) - à savoir, les projets personnels à vocation sociale et humanitaire - a été publié au Journal Officiel dimanche 13 juillet 2003.
Le Civis se substitue partiellement aux emplois-jeunes et comporte trois volets :
un accompagnement vers l’emploi pour des jeunes peu ou pas qualifiés ;
un accompagnement vers la création ou la reprise d’entreprise ;
un accompagnement des projets personnels à vocation sociale et humanitaire.
Ce dernier prévoit donc que " les jeunes porteurs d’un projet personnel peuvent être embauchés, avec l’aide financière de l’Etat et, le cas échéant, d’une ou plusieurs collectivités territoriales, par des organismes de droit privé à but non lucratif ".
Ces jeunes devront être âgées de 18 à 22 ans, être sans emploi et avoir un niveau de qualification "inférieur ou équivalent à un diplôme de fin de second cycle long de l’enseignement général, technique ou professionnel" ou ne pas "avoir achevé le premier cycle de l’enseignement supérieur".
La durée du contrat de travail est de trois ans maximum.
Le montant de l’aide de l’Etat est calculé "forfaitairement par référence au taux horaire du salaire minimum de croissance " (Smic), "y compris les cotisations et contributions patronales de toutes natures dont le paiement est exigé à raison du versement du salaire".
De plus, "le montant de l’aide de l’Etat ne peut dépasser 33 % du salaire minimum de croissance". Néanmoins, ce montant pourra atteindre "66 % du salaire minimum de croissance pour "l’aide aux personnes menacées d’exclusion, âgées ou handicapées", pour "le lien social dans les quartiers relevant de la politique de la ville" et pour "la politique d’intégration" et du sport".
Source : décret n°2003-644 du 11 juillet 2003 relatif à l’insertion des jeunes dans la vie sociale
3/ DES ORIENTATIONS 2004 ENTRE IDEOLOGIE ET PRAGMATISME ?
Au-delà des dispositifs existants ou nouvellement créés dans le cadre du "contrat présidentiel", le gouvernement cherche à "réhabiliter le travail", se dessine là les contours de plus en plus nets d’une politique de l’emploi résolument libérale sur la base de dispositifs déjà expérimentés dans certains pays européens se réclamant explicitement ou plus implicitement de cette approche (Royaume-Uni, Allemagne etc.). La question est peut être posée de savoir dans quelle proportion cette stratégie de dérégulation du marché du travail (temps de travail, type de contrats etc.) supposera la contribution du monde associatif : opérateur de l’insertion par l’activité économique, de l’engagement civique des jeunes, du temps "libéré" etc. Le volet "emploi" du projet de budget 2004, dès lors qu’il sera connu et détaillé, sera un indicateur significatif des orientations gouvernementales envers le monde associatif.
LE PROJET RMA EN DEBAT DANS LE MONDE ASSOCIATIF
Projet de loi décentralisant le RMI et créant un revenu minimum d’activité (RMA). Source : Uniopss
Le Sénat a adopté le 27 Mai 2003, en première lecture, le projet de loi décentralisant le RMI et créant un revenu minimum d’activité (RMA). Il a voté des amendements importants, qui, tous sauf un, vont dans le sens souhaité par l’UNIOPSS et le collectif ALERTE. On relèvera en particulier, parmi les amendements positifs, la meilleure définition du contrat d’insertion (le projet gouvernemental était sur ce point très inquiétant), la représentation des associations dans les Commissions Locales d’Insertion (CLI) et les commissions Départementales d’Insertion (CDI), l’assouplissement du contrat de RMA. En revanche, l’UNIOPSS et ALERTE dénoncent l’amendement du Sénat qui a supprimé l’obligation pour les Départements de consacrer 17% du montant des allocations à des actions d’insertion.
www.uniopss.asso.fr
UN BUDGET DE L’EMPLOI 2004 SOUS HAUTE SURVEILLANCE
Emploi : recul certain, éventuelle rallonge Source : Le Monde 2 août 03
Le budget du ministère de l’emploi sera en recul, sauf si l’on y intègre les compensations que l’Etat verse à la "Sécu" pour les nouvelles baisses de charges sociales accordées aux entreprises qui doivent financer la hausse du smic. Chez François Fillon, on reconnaît que les emplois aidés (CEC, CES…) seront moins nombreux, mais on n’exclut pas une éventuelle rallonge si le chômage - qui a fortement augmenté en juin (+25900) - progresse trop vite. "L’an dernier, rappelle un conseiller de monsieur Fillon, on a rajouté 80 000 contrats emplois solidarité au dernier moment alors…" A suivre sur le site de l’Assemblée nationale tout au long de l’automne 2003.
4/ ELEMENTS POUR UN POSITIONNEMENT ASSOCIATIF
Si le mouvement associatif sera vigilant sur l’examen du PLF 2004, un certain nombre de pistes de réflexions et d’actions peuvent être explorées et travaillées pour mieux fonder son action revendicative : faire connaître et comprendre les plus-values de l’emploi associatif dans une économie sociale de marché.
4.1 POUR UN MEILLEUR EQUILIBRE DE LA POLITIQUE DE L’EMPLOI
Revendiquer la nécessité d’une politique permanente d’emploi aidé dans les secteurs marchands ET non marchand au regard notamment de l’évolution positive de l’opinion publique sur cette action publique (DARES août 2003). S’interroger sur l’efficacité des mesures d’exonérations dans le secteur marchand (Cf. rapport du Conseil des impôts du 1er septembre 2003) et sur l’ampleur des aides publiques pour le soutien ou le sauvetage des entreprises privés (Air Lib, Alsthom, STMicroelectronics etc.).
Soutenir la nécessité d’une politique cohérente de l’emploi des jeunes au-delà du saucissonnage des publics cibles (Cf. l’apport du dispositif NSEJ sans critère de diplômes pour un continuum de débouchés et de nouvelles créations d’activités dans un cadre collectif et pas seulement individuel).
Valoriser l’investissement public dans le cadre de l’emploi aidé associatif : l’exemple du coût réel du dispositif NSEJ (aides de l’Etat - nouveaux revenus d’activités - nouvelles charges sociales - indemnisations sociales potentielles etc.).
4.2 EVALUATION PERMANENTE ET CONCERTEE DES DISPOSITIFS EN COURS
NSEJ : Disposer des informations sur les sorties du dispositif par régions, par secteurs ; connaître le nombre d’associations bénéficiaires d’aides complémentaires et leur nature (EC, CP), les critères d’éligibilité ; être informé de l’avancé du dispositif DLA - C2RA sur la base des diagnostics territoriaux et des plans régionaux de professionnalisation.
CIVIS : RMI-RMA des jeunes ? Quid de la mise en œuvre dans les secteurs "libres" (max 33%) et les secteurs contingentés (66%) qui se sont déjà répartis les postes (sport, ville, handicap…) ? Mesure de traitement social du chômage ou dispositif de volontariat aidé ? Quelle complémentarité avec la mise en œuvre du volontariat de cohésion sociale ? Volonté forte du secteur médico-social de professionnaliser le parcours CIVIS dans son secteur par rapport son potentiel d’emploi.
CONTRAT JEUNE : Au-delà du ciblage de population semble t-il réussi de la mesure, on peut faire le constat d’une mise en œuvre très ciblée sur des secteurs à faible qualification (bâtiment, industrie, restauration etc.) qui révèle par ailleurs une inégalité de traitement entre hommes et femmes et qui semble requalifier plus durablement des contrats existants à la faveur d’un effet d’aubaine en termes d’exonération de charges sociales. A la lecture de ces premiers résultats partiels, nous ne pouvons savoir combien d’associations sont concernées par le dispositif (activités culturelles et récréatives…) et avec quelles motivations.
5/ PROPOSITIONS CPCA
En cette rentrée 2003, deux types d’actions sont menées, l’une en direction des pouvoirs publics, l’autre au sein du mouvement associatif :
5.1 PROPOSER LA CONCERTATION AVEC LES POUVOIRS PUBLICS
Suite à une première rencontre avec le cabinet du ministre du travail en octobre 2002, l’offre avait été faite d’une nouvelle rencontre avec la CPCA. Une nouvelle demande d’audience a été communiqué sur la base de demandes concrètes :
l’état chiffré de sortie du dispositif NSEJ (nbre de sorties, nbre de postes en cours - national, régional, par secteurs ; nbre de conventionnement, type de conventionnement etc.) ;
l’implication des associations dans le contrat jeune en entreprise ;
les contingents de postes CIVIS par secteurs et niveaux de conventionnement ;
les cadrages budgétaires annoncés pour la loi de finances 2004 dans le domaine de l’emploi aidé.
5.2 ORGANISER UNE TABLE RONDE INTERASSOCIATIVE SUR L’EMPLOI
Le Conseil d’administration de la CPCA a souhaité reprendre le débat de fond engagé dans le cadre du séminaire interne de Sèvres (mai 2003) consacré à l’emploi associatif dans un cadre élargi notamment aux syndicats d’employeurs associatifs, pour évaluer ainsi différentes perspectives d’actions :
une analyse des représentations de l’opinion publique sur l’emploi associatif et l’économie associative ;
une communication globale de valorisation de l’emploi associatif, c’est-à-dire des filières d’activités, des compétences recherchées, des "spécificités méritoires" de l’emploi associatif ;
une analyse comparative des subventions au secteur marchand et non marchand pour la création d’emploi ;
une communication claire sur l’articulation des activités issues du secteur non marchand et de l’économie de marché…