Ce deuxième Céreq Bref issu de l’étude « C>Terre » analyse les liens entre la notion de « responsabilité sociétale des entreprises » (RSE) et la transition écologique. Pour les entreprises, cette dernière prend souvent la forme de la contrainte réglementaire. Mais qu’en est-il des leviers non contraignants d’écologisation, tel celui de la RSE ? Comment les entreprises mobilisent-elles cette démarche fondée sur l’engagement volontaire ? Emmanuel SULZER s’intéresse ici à la façon dont la RSE peut constituer un cadre d’appropriation par les entreprises de la question environnementale.
De la responsabilité sociale à la responsabilité sociétale de l’entreprise
- En 2001, le livre vert « promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises » définit la RSE comme « l’intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes ».
- Issues d’institutions internationales (ONU, OIT…), ces démarches relèvent de la soft law : elles n’ont pas le pouvoir coercitif des normes juridiques, assorties de sanctions étatiques (hard law).
- À partir des années 2010, le « S » de social devient le « S » de sociétal pour une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux.
- En France, cela s’est traduit par plusieurs textes réglementaires et législatifs. La transposition en droit national de la directive européenne RSE de 2014 oblige les grandes entreprises (au-delà de 500 salariés, de 20 millions d’euros de bilan ou de 40 millions d’euros de chiffre d’affaire…) à communiquer sur les implications sociales et environnementales de leurs activités. En 2021, de nombreuses dispositions de la loi « Climat et résilience » sont contraignantes notamment dans le domaine du logement. Du point de vue réglementaire, la France est plutôt avancée.
Engagement RSE et pratiques RH
- Attentes sociales et écologiques peuvent être contradictoires. Un des principaux enjeux de la RSE est de résoudre ce potentiel conflit entre objectifs comme c’est le cas lors de l’arrêt d’activités polluantes engendrant des suppressions d’emplois.
- Toutefois, le versant environnemental n’est pas toujours pris en compte et lorsqu’il l’est, cela ne débouche pas nécessairement sur la transformation du travail attendue, cela étant lié aux demandes des différentes parties prenantes de l’entreprise : clients, fournisseurs, salariés, collectivités locales.
- Si dans le BTP, les grandes entreprises sont aujourd’hui à même d’écologiser leur mode de production, ce n’est pas toujours le cas des PME-TPE très majoritaires. Pour ces dernières, c’est souvent le maître d’ouvrage qui a la plus grande influence et qui a comme objectif premier la maîtrise des coûts et non la protection de l’environnement.
Responsabilité sociétale des entreprises face à la transition écologique… La transition écologique pose de plus en plus la question de la transformation du travail et de ses modes d’organisation. Sa prise en compte à travers les démarches de RSE devrait se traduire dans l’évolution des pratiques RH. Cependant, l’auteur note pour le moment la faiblesse des mutations en cours. Les pratiques gestionnaires ne reflètent pas encore nettement les préoccupations environnementales et la problématique de l’écologisation demeure balbutiante. Il y a donc urgence à prendre en compte le volet travail par les entreprises comme condition nécessaire de la transition écologique. Il faudra dans les années qui viennent évaluer la loi « Climat » et poursuivre les interrogations menées dans le cadre de l’étude C>Terre.
La responsabilité sociétale des entreprises face à la transition écologique
Emmanuel Sulzer
Céreq Bref n° 430, 2022, 4 p.