Plus de 72.000 créations au cours de l’année 2007-2008 : une bonne nouvelle ou un risque d’encombrement ? Pour la première fois, l’équipe de Recherches & Solidarités a pu travailler sur une nouvelle nomenclature, plus fine, comportant désormais 31 thèmes et 247 activités différentes.
Elle permet un meilleur suivi des initiatives des « bâtisseurs associatifs ». A titre d’exemples, sur 12.400 associations sportives créées en 2007-2008, 20% se passionnent pour les sports mécaniques ; sur 17.200 associations culturelles, 25% se consacrent à la musique, 12% au théâtre, 9% à la danse…
Deux cartes de France mettent en parallèle les départements reconnus pour être les plus « bâtisseurs » (créations d’associations sur 10 ans) et ceux qui se sont particulièrement démarqués cette année.
L’emploi associatif : un enjeu économique et social
L’équipe de Recherches & Solidarités travaille depuis trois années avec l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS-URSSAF) et la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) pour observer et commenter l’évolution de l’emploi dans le secteur associatif. En 2007, il comportait plus de 175.000 associations employeurs, 1.720.000 emplois, pour une masse salariale de 31 milliards d’euros. Un emploi salarié privé sur 10 se situe dans une association.
Dans une période difficile, ce secteur apporte une note positive et encourageante : il a créé plus de 250.000 emplois depuis 2000, dont 40.000 pour la seule année 2007. Cet emploi progresse plus vite que dans le reste du secteur privé. Son ancrage territorial le met à l’abri des risques de délocalisation.
une présence dans les territoires les plus isoles
Près de 80% des associations employeurs ont moins de 10 salariés. Elles sont présentes et actives dans tous les domaines d’activité et dans tous les territoires, et tout particulièrement dans les départements ruraux. Une carte de France montre ces enjeux très importants, par exemple dans une quinzaine de départements des Hautes-Pyrénées à l’Ardèche.
L’opinion des responsables associatifs
Avec plus de 4.600 responsables associatifs différents interrogés en trois vagues annuelles, la parole est désormais donnée régulièrement aux élus bénévoles. Ils peuvent exprimer leurs satisfactions (42%) mais aussi leurs inquiétudes (38%), voire leur détresse en matière de finances et de bénévolat (18%).
Ils sont très majoritairement en relation avec les communes, mais de plus en plus, aussi, avec les Conseils généraux (36%), les Conseils régionaux (17%), et les Communautés d’agglomérations ou de communes (24%). Un quart d’entre eux (24%) estiment ces relations insatisfaisantes, et attendent surtout des échanges et une véritable coopération.
Enfin, les dirigeants sont très nombreux (73%) à estimer que leur association a une responsabilité citoyenne, au-delà de son objet, notamment en situation de crise, même s’ils ont encore assez peu d’expériences en la matière.
S’il est intéressant de constater que les territoires les plus enclavés ou délaissés donnent naissance proportionnellement à plus d’associations nouvelles, quel sens commun ont l’ensemble des acteurs associatifs au sein de leurs territoires administratifs respectifs et de référence. Quels sont les objets sociaux de ces créations ? Sectoriels ou généralistes ?
Les traditionnels Forum des Associations communaux, sont rarement intercommunaux et départementaux quasi inexistant sauf quand quelques volontés politiques ont pris la mesure des exceptionelles capacités et compétences qui s’y lovent.
Nous connaissons des Départements qui se sont dotés d’une Assemblée permanente de la vie associative, qui y engage une démarche réflexive sur le sens des engagements exprimés et sur les contributions au bien commun. Prélude à des budgets participatifs qui enlèvent une épine du pieds aux élus. Elus souvent dépourvus d’une argumentation débattue pour les attributions des subventions et parfois légers dans les bilans d’évolution du "bien commun".
Dans cette dynamique, les Assises de la vie associative quand elles sont bien préparées rejoignent en les liant les préoccupations croisées ou contigues des Forums des Métiers, des Forums des Associations , des Forums des citoyens et des Forums sociaux locaux .
A ce point de positionnement des acteurs associatifs, des acteurs économiques, des citoyens, la question de la nature de l’économie générale d’un ou des territoires ne peut guère être esquivée, nous ne tarderons pas à voir s’affirmer et s’afficher des mixtes qui nécessairement prendrons appui sur l’économie sociale et solidaire.
Dans cette économie plus " plurielle" des territoires demeure la question de la transmission de ses référents de valeurs plus humaines, juridiques, économiques et sociales, une vraie question culturelle qui va devoir faire sa place dans le processus éducatif.
Une hypothèse pas si audacieuse que cela voudrait que la vie associative rappatrie dans l’économie hortodoxe la part d’économie relationnelle disparue. En tous cas plus de co-élaboration du projet et de son contrôle continu, ce qui ressemble à un retour de quelques pionnières expériences du genre sociétés coopératives autogérées . De la Drôme d’o๠ce commentaire est écrit , il est instructif de voir ressurgir dans la vie culturelle valentinoise la mémoire de " BOIMONDAU" ( BOItierMONtreDAUphiné) communauté horlogère ouvrière autogérée de 1941 à 1961, avec toutes les déclinaisons, des jardins solidaires, de l’auto-construction, de bibliothèque et de cours du soir, de co-responsabilités, de direction collègiale ou tournante, des solidarités de toutes natures.
La crise du sens, autant du travail, des sciences et des techniques, de l’éducation, de la culture, de l’économie, des parcours de vie, conduit à remettre sur le métier ces questionnements "fondamentaux" . Aussi la multiplication des associations naissantes ne serait qu’une fuite en avant quantitative alors que c’est la valeur d’usage, l’utilité sociale de l’engagement associatif qui sera déterminant d’une nouvelle strcturation de nos sociétés. La pyramide des à¢ges pour aborder la question de la mixité intergénérationnelle au sein des associations laisse apparaà®tre une urgence, celle de la coopération intergénérationnelle. Dans une intervention remarquée " Âges et usages de la vie " au Théà¢tre des idées en Avignon 2008, le philosophe Pierre Henri Tavoillot évoquait la confusion des à¢ges avec le marketing tous azimuts pas particulier incitateur à la coopération relationnelle sauf par l’étrange image d’une éternelle jeunesse ou le conflit des générations l’envers de la réalité du vieillisement avec une inexorable baisse de tonicité.
Une troisième voie réside dans des coopérations renforcées autant dans la vie sociale en général que dans les activités dites économiques. Là encore la forme coopérative et l’ESS proposent des modélisations qui s’émancipent des "gouvernances invisibles" des financiers et des techno-structures dont nous subissons les déficits de loyauté évidents.
Rétablir la confiance qui est le maà®tre mot d’actualité, induit peut-être que nous nous fassions confiance à nous-mêmes pour coopérer à vue, à porter de voix et d’oreilles,
avec sans doute aussi la part de liens nouveaux des technologies de l’information et de la communication qui ne suffisent pas à (re)constituer des cultures communes "les pieds sur terre".
Sans suggérer un contrôle des naissances pour la vie associative, comme pour les entreprises, la relève et la survie d’un grand nombre restent problématique et un baromètre quantitatif demeure insatisfaisant pour témoigner de la santé de celle-ci.
Un avatar d’une société malade de la gestion.
cf. Anthroplogie du projet et sociologie appliquée au développement local
CNAM Angers " Imaginaires, savoirs, connaissance " et Faculté d’anthropologie et de sociologie de l’université Lyon 2