Le verdict provisoire de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) va être connu. Officieusement, les Etats-Unis auraient gagné dans le conflit sur les OGM qui les oppose à l’Union Européenne [1]. Le recours déposé devant l’OMC par les Etats-Unis, le Canada et l’Argentine porte sur le "moratoire" européen et les interdictions nationales contre certains OGM [2]. Le rapport intermédiaire sera remis aux pays concernés. Dans la pure tradition du secret qui caractérise l’OMC, nous n’aurons comme informations, que ce que les Etats-Unis et la Commission Européenne voudront bien nous en dire [3].
En fait, le problème dépasse largement les compétences de l’OMC. L’Union Européenne et les Etats membres n’ont ni à reconnaître la décision de l’OMC, ni à s’y plier, car l’OMC n’est pas une Cour de Justice Internationale. Les seuls principes que reconnaît l’OMC sont les principes de la libre circulation des marchandises. Le panel de l’Organisme de Règlement des Différends n’est pas composé de juges mais d’experts et d’avocats commerciaux. Une cour de justice internationale s’appuierait, elle, sur le droit international défini par d’autres instances que l’OMC, notamment sur le Protocole de Biosécurité qui reconnaít le principe de précaution et le droit des pays à interdire les OGM [4].
Pour Christian Berdot, animateur de la campagne OGM des Amis de la Terre : « Ce verdict est la décision interne d’une organisation qui n’a aucune légitimité démocratique, aucune compétence sur les questions environnementales et sociales, et qui ne peut en aucun cas prévaloir sur le droit international défini par l’ONU. Le principe de précaution est reconnu internationalement et chaque pays a le droit de protéger ses citoyens et son environnement, notamment contre les risques de contamination génétique. Nous attendons des responsables politiques européens et nationaux qu’ils proclament haut et fort que le droit des peuples passe avant le droit des multinationales. »
« Si, au contraire, ce jugement est accepté, on peut à l’avenir s’attendre à voir remise en cause par l’OMC, toute réglementation protégeant notre santé et l’environnement, comme la directive REACH sur les produits chimiques, ou les règlements européens sur l’étiquetage et la traçabilité des OGM ! » ajoute Christian Berdot. « Mais cette décision ne brisera pas la résistance des Européens, au contraire : le nombre de régions se déclarant sans OGM ne cesse d’augmenter. Nous en sommes à 172 alors que l’Autriche et la Grèce préparent de nouvelles interdictions nationales contre les maïs GT73 et MON810 ! » conclut-il .