Après six jours d’opération militaire au Mali, le renforcement de l’engagement de la France, avec l’envoi de forces terrestres combattantes, nécessite le plus rapidement possible une mise en conformité de cette intervention avec le cadre défini par la résolution 2085 du 20 décembre 2012 du Conseil de sécurité des Nations unies, à savoir le déploiement d’une force internationale.
Si l’opération a été lancée à l’appel des autorités maliennes, répond au Chapitre VII de la Charte des Nations unies, et compte sur le soutien de la majorité de la population malienne, ces légitimités ne requièrent pas moins la plus grande vigilance pour protéger les civils et éviter des bavures, voire des crimes de guerre de la part des forces coalisées. Le CCFD-Terre Solidaire et ses organisations partenaires maliennes demandent plus d’informations sur le calendrier à venir et plus de transparence dans la conduite des opérations. Il est également urgent d’obtenir des garanties quant à la protection des civils et les solutions politiques pour construire la paix. Nous redoutons également une hausse soudaine des prix des produits alimentaires du fait de l’impact du conflit sur la circulation des marchandises, mettant en danger des populations déjà fragilisées par la récente crise alimentaire et un an de crise politique.
« Le soutien au sein de la population malienne en faveur de l’intervention militaire française ne doit pas occulter le risque de violations des droits humains. Les allégations d’exactions de la part de l’armée malienne dans la région de Mopti rendent urgentes des garanties sur la bonne conduite des troupes combattantes de la part des autorités françaises et maliennes. La Cour pénale internationale, déjà saisie par le Mali sur les crimes commis au Nord, doit se donner les moyens d’enquêter sur le terrain pour prévenir ou traiter les abus commis par les différents belligérants. Par ailleurs, tout comme nos organisations partenaires maliennes, nous redoutons des représailles et des exactions perpétrées par des civils armés une fois les territoires libérés », a affirmé Bernard Pinaud, délégué général du CCFD-Terre Solidaire.
Présent à Bamako il y a quelques semaines, Philippe Mayol, responsable Afrique au CCFD-Terre Solidaire, analyse : « Les semaines qui viennent vont être cruciales pour l’avenir du pays. L’attention de la communauté internationale pour le Mali et le Sahel en général ne doit pas se limiter aux aspects militaires et sécuritaires. La définition d’une solution politique (copilotée au niveau régional en coordination avec les Nations Unies) reste la seule voie possible pour une issue durable au conflit et à la crise politique que connaît le Mali. L’analyse des causes profondes de la situation nous montre une fracture entre les populations maliennes et les responsables politiques du pays. Les enseignements des échecs des accords passés entre Bamako et le Nord du pays viennent conforter ce fait. Pour gagner la paix et sortir de la crise institutionnelle du pays, il faut dès maintenant impliquer les populations du Nord, notamment les Touaregs, et du Sud, dont la société civile locale. »
Enfin, le CCFD-Terre Solidaire alerte sur la nécessité de s’attaquer à la circulation des armes dans la région du Sahel. Voir l’analyse de Zobel Behalal, chargé de plaidoyer Prévention et résolution des conflits, sur la question.