Objet : Vote de la loi relative au contrat de volontariat de la solidarité internationale inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale
Relance de notre dernier courrier précédant l’examen du projet de loi en première lecture pour rétablissement de l’amendement de l’article 4 suite à son annulation au Sénat en deuxième lecture.
Le 4 mai 2004, un amendement présenté conjointement par le Docteur Jean- Paul Bacquet (PS) et le rapporteur du projet, Jacques Godfrain ( UMP) fut voté par l’Assemblée nationale pour ramener la durée cumulée possible de missions sous contrat volontaire de la solidarité internationale à 3 ans. Les députés Michel Destot (PS) et Claude Leteurte (UDF) ont fait valoir que la durée cumulée de 6 ans, prévue dans le projet initial, risquait d’enfermer les volontaires « dans la précarité »
Cet amendement permettait à cette loi de tenir ses promesses en encourageant par un meilleur encadrement la spécificité française de l’engagement au titre du volontariat.
Pourtant, sur recommandation de la commission des affaires étrangères du Sénat, cet amendement a été annulé lors de l’examen du projet de loi en deuxième lecture au Sénat le 12 octobre 2004.Cette décision constitue un sérieux revers pour tous les expatriés de la solidarité internationale. Elle nous inquiète et justifie la présente relance compte tenu de notre position initiale.
En effet, RH considère qu’en l’état, le texte de loi n’offrirait que peu d’avancées par rapport au décret de 1995 qui réglementait le volontariat de la solidarité internationale.
Rappel : En substance, le projet de loi :
1/ légaliserait donc la possibilité d’engager du personnel expatrié sous ce statut de volontaire pendant 6 ans. RH estime que cette durée est excessive.
RH met en garde sur le danger d’un engagement trop long et trop peu protecteur socialement.
Lorsqu’un engagement se prolonge au delà de 2 ans, il ne s’inscrit plus dans le cadre d’une action volontaire et temporaire mais bien dans une perspective professionnelle qui, elle, doit relever du droit du travail et doit se négocier sur la base d’un contrat salarié.
Le dispositif législatif en cours de finalisation doit encourager la fidélisation des cadres et experts dont les ONG ont besoin.
Il convient d’aider les associations de solidarité internationale à conserver une image attractive et à maintenir le flux des volontaires ( près de 4000 départs en mission en 2003)
2/ Précariserait les volontaires du fait que ce statut n’ouvre pas de droit aux allocations chômage.
Ce point est crucial : beaucoup de volontaires en fin de contrat, de retour en France, se retrouvent dans une situation de précarité dramatique, comme l’a montré l’enquête de Résonances Humanitaires. Ceux-ci ne disposent pas des ressources suffisantes pour réorienter leur carrière professionnelle, ce qui demande du temps.
(Résultats téléchargeables sur le site www.resonanceshumanitaires.org)
Au delà d’une certaine durée, le système du volontariat accentue de manière intolérable la précarité et l’insécurité des expatriés de la solidarité internationale.
Aussi, Résonances Humanitaires demande que soit rétabli l’amendement « des 3 ans » voté par l’Assemblée nationale en première lecture. Cela permettra en outre d’éviter la fuite d’une grande partie du personnel expérimenté des OSI françaises vers des OSI étrangères ou des organisations internationales qui offrent aux expatriés de meilleures garanties.
A Paris, le 18 novembre 2004
Daniel Mulard, président de RH ,et, Eric Gazeau, fondateur et directeur de RH,
NB.- Projet de loi et compte rendus débats consultables sur www.senat.fr et www.assemblee-nat.fr - Au verso : Témoignage d’un volontaire de le solidarité internationale- extrait du mémoire Maîtrise de Sociologie N° 408134 soutenu en 2004 à la Faculté de Toulouse 2.
Témoignage d’un volontaire de la solidarité internationale -
Extrait du mémoire de Maîtrise de Sociologie N° 408134 soutenu en 2004 - Page 56/73- Faculté Toulouse 2 Le Mirail
… « Tu pourras postuler au bout d’un an à un poste de salarié. » C’est un discours entendu aujourd’hui dans de plus en plus d’ONG par les volontaires de retour de mission .
Le problème, c’est que, j’en ai discuté encore ce matin à Médecins Sans Frontières, avec la DRH, elle disait : « Mais oui, mais chez nous il n’y a pas de problèmes ! »
Et, je lui disais : « Les gens maintenant au bout d’un an peuvent devenir salariés, mais combien de personnes ont en fait enchaîné auparavant plusieurs missions ailleurs, dans d’autres ONG ? Combien ? » Et, dans chaque ONG, on dit : « Attends un an et puis on verra ! » Donc, résultat, la grande majorité des gens qui partent en mission, développement ou humanitaire, et bien ils sont sous statut volontaire. Un statut qui fait l’objet d’un projet de loi actuellement, sur lequel je ne suis pas d’accord.
Je ne suis pas d’accord parce que l’on mélange deux types de populations :
Je suis pour favoriser les départs en mission, pour les jeunes, pour tout le monde, les retraités… On a besoin de monde dans les ONG !
Mais il y a une différence entre ceux qui partent sur des périodes courtes et les autres qui deviennent professionnels au service des ONG. Ces professionnels, on se fout carrément de leur gueule ! C’est-à-dire qu’on ne les paie pas… Ils n’ont pas de statut. Et moi, je l’ai vécu ça. Pendant 10 ans je n’ai pas gagné un radis ! Je pense pourtant que j’ai eu des responsabilités (…)
C’est une hypocrisie de dire : « Ca va…sur le terrain, vous êtes blanchi, nourri, vous avez une assurance rapatriement. On vous donne pendant votre mission une indemnité mensuelle de 1000 euros au maxi qui tombe sur un compte en France et en plus c’est défiscalisé ! »
On oublie de préciser que ce statut n’offre des droits à la retraite qu’à minima, qu’il n’ouvre pas droit aux allocations chômage et que le volontaire n’a pas de fiches de salaire.
Au retour de mission, je l’ai vécu personnellement, t’essaye de trouver un appart ou un emploi. On te demande : « Vous étiez quoi ? Volontaire, ça veut dire bénévole ? »
Et, on pense que tes missions ne représentent pas une activité professionnelle ! »
Par ailleurs, les seules allocations chômage auxquelles tu peux prétendre sont les allocations de tes activités précédentes, avant de partir. Mais, si tu pars longtemps, eh ben, t’as plus droit à rien si ce n’est le RMI !
S’agissant de gens qui sont qualifiés, qui ont eu des responsabilités d’encadrement, dans des situations parfois tragiques et difficiles, je trouve cette situation scandaleuse ! » …