L’éthanol constitue-t-il la panacée pour combattre la crise pétrolière et faire baisser les prix de l’essence qui volent de record en record ? Aux Etats-Unis, certains écologistes ont des doutes.
Les industriels et la classe politique à Washington semblent avoir rédecouvert les vertus de ce bio-carburant fabriqué à base d’huile de tournesol ou de colza, et font valoir qu’en l’utilisant davantage on pourrait faire baisser les prix du pétrole, améliorer la qualité de l’air, et donner aussi un sérieux coup de pouce aux revenus des agriculteurs.
Mais les critiques ne l’entendent pas de cette oreille et font valoir qu’il existe d’autres méthodes plus efficaces pour lutter contre la crise pétrolière que de mettre sur le marché un carburant-bio lui même gourmand en énergie pour sa production.
"J’aimerais que l’éthanol soit aussi formidable que le disent ses partisans, mais il est désastreux que cela ait été proposé comme la solution à nos problèmes pétroliers", estime David Pimentel, professeur en sciences agricoles et écologiques à l’université de Cornell.
Non seulement l’éthanol consomme 30% d’énergie en plus qu’il n’en produit, souligne M. Pimentel. Les pesticides et engrais nécessaires à sa production polluent aussi l’eau, entre autres problèmes environnementaux.
De son côté, le groupement national pour les véhicules à l’éthanol assure que la production est devenue beaucoup moins gourmande en énergie ces vingt dernières années, et qu’elle continuera de s’améliorer.
Il existe pour le moment deux types de carburants à l’éthanol : l’E10, un mélange contenant 10% d’éthanol, qui peut être utilisé dans n’importe quel véhicule et est utilisé dans 40% de l’essence vendue aux Etats-Unis, et l’E85, un mélange intégrant 85% d’éthanol conçu pour des véhicules spéciaux.
Malgré l’intérêt marqué par les constructeurs automobile, toute la question est de savoir si les consommateurs sont prêts pour des véhicules demandant un carburant et un moteur différents.
Seuls 7% des acheteurs affirmaient l’an dernier que l’"effet sur l’environnemment" était l’un des critères clé de leur achat de véhicule, selon une étude du cabinet J.D. Power and Associates.
"Les gens adhéreront à cette idée tant qu’ils ne seront pas bien renseignés. Ils comprendront ensuite que ce n’est pas la solution à notre problème énergétique", assure M. Pimentel.
L’éthanol pose aussi d’autres problèmes. D’abord la consommation est plus élevée pour les véhicules roulant à l’éthanol qu’à l’essence. Ensuite les infrastructures manquent : sur les 180.000 stations essence des Etats-Unis, seules 600 vendent de l’éthanol. Leur nombre devrait augmenter à 2.000 environ du fait d’une remise d’impôt pour les stations proposant ce type de carburant.
Aussi beaucoup jugent-ils que le jeu en vaut la chandelle.
Le président américain George W. Bush veut augmenter la production d’éthanol pour qu’elle remplace 30% de l’essence d’ici 2030.
En janvier, deux sénateurs ont présenté un projet de loi obligeant les constructeurs automobiles à augmenter le nombre de véhicules roulant à l’éthanol jusqu’à ce que presque tous soient équipés de ce système.
Les constructeurs y croient aussi. General Motors a lancé une campagne vantant l’éthanol. Toyota, leader sur le segment des véhicules hybrides (essence/électricité), a assuré qu’il s’intéressait à la technologie de l’éthanol.
Chrysler de son côté compte ajouter trois modèles à sa gammes de véhicules roulant à l’éthanol à l’automne, et Ford estime qu’il en aura vendu 2 millions d’ici la fin de l’année.