Le rôle décisif du bénévolat émerge dans le débat national lancé par le gouvernement sur la prise
en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées. Celui‐ci doit s’inscrire dans le mouvement associatif et exigera du courage politique.
L’idée de substitution consistant à imaginer que l’aide publique déresponsabiliserait les familles et
réduirait leur engagement pour aider leurs proches est fausse. L’observation des solidarités pratiques
montre qu’il n’y a pas d’opposition entre aide publique et maintien des solidarités privées. Au
contraire, les deux se renforcent.
Ce sont les aidants familiaux qui apportent le plus d’aide, ils sont indispensables et le seront encore
dans l’avenir. La solidarité publique devra prévoir de les soutenir et de les aider efficacement.
Mais l’importance du nombre de personnes âgées en situation d’isolement ‐ une personne sur quatre
de plus de 75 ans souffrant d’un handicap invalidant vit objectivement isolée en France ‐, le risque
d’épuisement des aidants familiaux (et d’effritement de leurs capacités potentielles) et le nombre de
personnes qui n’ont pas accès aux aides du fait de leur situation de précarité ou d’exclusion, invitent
à identifier un acteur décisif de l’aide pour l’avenir : le bénévolat associatif.
Un bénévolat pour lutter contre l’isolement
Les bénévoles des associations agissent dans la proximité pour lutter contre l’isolement des
personnes souffrant de solitude. Ils ne sont ni un substitut de l’aidant familial, ni un substitut des
professionnels et leurs interventions ne doivent en aucun cas minorer le plan d’aide.
Vivre des relations affectives proches et régulières retarde l’apparition des pertes de mobilité et
même, comme certaines études le confirment, les troubles liés aux maladies neurodégénératives.
L’accompagnement relationnel bénévole participe donc à la prévention de la perte d’autonomie, au
maintien des personnes à domicile, favorise l’accès aux aides, aux services, aux droits et facilite
l’intervention des professionnels. Il évite bien souvent les placements d’urgence en établissement et
améliore les conditions de retour à domicile en cas d’hospitalisation. Il est particulièrement essentiel
dans les périodes de vulnérabilité (perte d’un conjoint, maladie, rupture…).
L’aide bénévole centrée sur la relation inter personnelle entre deux « citoyens » intervient aussi bien
dans des contextes très médicalisés qu’à domicile ou en établissement. Ces relations de proximité
participent à une veille efficace auprès des personnes isolées les plus vulnérables en cas d’urgences
climatiques ou pandémiques.
Un bénévolat associatif
Le bénévolat ne doit pas être instrumentalisé. Il doit être organisé en associations indépendantes.
Ce qui motive l’engagement est de pouvoir choisir librement les valeurs et le collectif que l’on veut
défendre, de pouvoir influencer un projet commun qui évolue, d’innover et d’exprimer des positions
issues de l’expérience. Chaque association a son identité, son histoire et sa culture propres qui
doivent être respectées.
Par ailleurs, si les relations informelles de proximité, telles que le voisinage, doivent être
encouragées, pour être assumées à long terme elles devraient pouvoir s’adosser sur la forme
associative d’organisation qui rend la charge plus collective lorsque la personne demande des soins
rapprochés ou dans la durée.
Sur leur champ, plus sociétal que social (il s’agit ici davantage de fraternité que d’égalité), les
associations permettent de répondre à une dimension éthique du débat : mobilisation et
engagement de chacun, place et respect des personnes âgées dans la société, amélioration des
relations intergénérationnelles, intégration dans la « vie ordinaire », lutte contre la négligence,
animation continue du débat…
Les associations sont ainsi force de proposition et contribuent à alimenter les réflexions sur la qualité
de l’offre de service. Elles peuvent aussi alerter.
16 mai 2011
Une loi qui ose le développement associatif
C’est donc, en effet, plus largement la solidarité primaire de proximité, et non pas exclusivement
familiale, qui revêt une dimension décisive pour l’avenir et qui nécessite reconnaissance et appuis
des pouvoirs publics. Le rôle et la place de ce bénévolat associatif devraient donc être légitimés dans
la loi, à l’instar du bénévolat d’accompagnement dans le champ des soins palliatifs.
Ce cadre posé faciliterait l’intervention des acteurs, entre aidants familiaux, associations de
bénévoles et professionnels. Il permettrait aussi de se doter de moyens pour engager un véritable
programme de développement d’équipes de bénévoles de proximité, à la hauteur des besoins et des
enjeux futurs, à la condition sine qua non qu’elles soient organisées sous une forme
associative indépendante et dotées d’un projet associatif qui assure la qualité de l’accompagnement
par un recrutement, des formations et des modes de soutien adaptés aux bénévoles.
Les différents opérateurs associatifs de ce programme agiraient et se coordonneraient dans la
proximité et avec les partenaires territoriaux.
Oser promouvoir un tel programme serait un signe politique fort de confiance dans la société civile. Il
ne fonctionnera que si l’État résiste à l’instrumentalisation du bénévolat.
Jean‐François SERRES, Secrétaire général des petits frères des Pauvres
Jean FONTANIEU, Secrétaire général de la Fédération de l’Entraide Protestante (FEP)
Dominique THIERRY, Vice‐président national de France Bénévolat
François SOULAGE, Président du Secours Catholique
Richard HUTIN, Directeur Général de la Fondation Claude Pompidou
Michel TANFIN, Président de l’ADMR, la référence du service à la personne.
Michèle RIVIERE DE PRECOURT, Présidente Nationale de la Fédération Française des Equipes Saint‐Vincent
Bruno ANGLES D’AURIAC, Président de la Fondation Médéric Alzheimer
Jean‐François MATTEI, Président de la Croix‐Rouge française
Massimo PAONE, Président de la Fondation de l’Armée du Salut
Dominique BALMARY, Président de l’UNIOPSS (Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux)