Quelle place pour les associations dans la feuille de route ESS ?

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Quelle place pour les associations dans la feuille de route ESS ?

Le 6 novembre dernier, Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et oyennes entreprises qui compte dans son portefeuille l’économie sociale et solidaire (ESS), présentait sa feuille de route. Elle retrouve ainsi un sujet qu’elle connaît bien puisqu’elle avait été secrétaire d’Etat chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable entre 2020 et 2022.

Elle sera épaulée par un nouveau délégué ministériel à l’ESS, Maxime Baduel, jusqu’alors directeur de l’association Solidarités nouvelles pour le logement et qui avait déjà travaillé avec elle au ministère en 2020. Son fil rouge : rapprocher l’ESS de l’économie classique. Faire déteindre ou faire fondre les principes de l’ESS sur/dans l’économie classique ? La question reste en suspens mais tout au long de son discours on entend bien que lorsqu’elle parle de l’économie sociale et solidaire, la ministre voit essentiellement des entreprises (certes avec une gouvernance particulière) mais pas vraiment les associations qui sont pourtant la forme majoritaire au sein de l’ESS. Elle assure vouloir remplir sa promesse de 2020, jamais réalisée, de placer un équivalent temps plein dédié à l’ESS dans chaque préfecture, renforcer les chambres régionales de l’ESS et poursuivre le soutien au pôles territoriaux de coopération économique PTCE avec des budgets pour le moins restreints.

Son budget atteint, comme l’année précédente, 20 millions d’euros. Dans cette enveloppe ont été notamment annoncé : un million d’euros par an sur trois ans pour un fonds d’amorçage sur les projets d’ESS en territoire rural et 2,5 millions d’euros par an pour les PTCE. Par ailleurs, elle renouvelle « sa passion » pour les contrats à impact (CIS). Ils seront un axe fort de sa feuille de route. Un peu délaissés du temps de Marlène Schiappa, ces contrats retrouvent donc avec Olivia Grégoire une ardente défenseuse. Elle souhaite les simplifier pour mieux « les massifier » comme elle l’avait déjà annoncé lors de la remise du rapport de Thomas Cazenave visant au développement de ces contrats en 2022 (Klaxon#2).

Un rapport dont elle assure vouloir s’inspirer et qui, rappelons- le, appelait à se défaire des considérations morales françaises et à augmenter les taux d’intérêt de ces contrats pour mieux attirerles investisseurs financiers. Elle annonce vouloir raccourcir la phase de structuration pour qu’elle ne dépasse pas douze mois là où aujourd’hui elle peut s’étendre sur plusieurs années. Un certain nombre de nouveaux contrats devaient être annoncés. Depuis 2020, trois appels à projets ont été lancés en 2021 et 2022, une vingtaine de contrats ont été sélectionnés dont certains sont toujours en phase de structuration. (voir notre tableau dans le rapport). Or, l’enveloppe totale consacrée à tous ces CIS (et qui sera donc remboursée au final par l’Etat) atteint plus de 52 millions d’euros …

Dans le projet de loi de Finances pour 2024, le budget de 19,2 millions d’euros alloué à l’ESS est détaillé. L’enveloppe (4,1 millions) dédiée au développement des structures de l’ESS est réduite tandis que l’investissement a impact reçoit 1,4 millions. « Cette évolution s’explique notamment par le fait que l’Etat va procéder au paiement de sa contribution annuelle aux contrats à impact engagés et initier de nouveaux contrats à impact » explique le Mouvement associatif dans son analyse du projet de finances. Ce glissement marque bien le risque que représente, pour les structures historiques de l’ESS, le développement de l’investissement à impact qui vient clairement, dans ce projet de Finances, amputer une partie du financement de l’ESS au profit, soulignons-le, d’acteurs qui en sont très éloignés comme, par exemple, BNP Paribas structurateur et investisseur de la plupart des contrats à impact en France.

Concernant une révision de la loi Hamon de 2014, annoncée par Marlène Schiappa à l’époque, elle rétropédale assurant que si certains points peuvent être améliorés, la loi ne sera pas changée en une loi Grégoire. Pas de loi de programmation non plus pour l’ESS mais un « contrat de filière » qui laisse sceptique de nombreux acteurs puisqu’un tel contrat aura du mal à prendre en compte l’aspect transverse de l’ESS, et notamment la place des associations, sauf à ne pas considérer cette transversalité, ce qui semble être la vision d’Olivia Grégoire.

(Article tiré du Klaxon numéro 19 de novembre 2023)

Klaxon numéro 19 de novembre 2023

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