Les discours des pouvoirs publics et des médias décrivent souvent l’image d’une société divisée avec d’un côté des individus entrepreneurs d’eux-mêmes, autonomes, dynamiques et sans difficultés particulières ; et de l’autre des personnes « fragiles », publics des politiques sociales, enferrés dans un chômage de longue durée, en prise avec des problèmes de santé, etc.
L’enquête Conditions de vie et aspirations du CREDOC réalisée en 2019 permet de battre en brèche cette vision. Elle montre que les deux tiers de la population se trouvent confrontés à au moins une des six situations de fragilité étudiées : pauvreté monétaire, handicap et/ou santé dégradée, relégation territoriale, isolement et solitude, précarité professionnelle, difficultés de logement. Et un tiers fait face à plusieurs de ces difficultés. Il n’existe donc pas d’un côté des personnes autonomes et de l’autre des publics fragiles, mais des moments de vie, des accidents de parcours qui peuvent faire basculer une personne dans une situation où l’écheveau des difficultés devient complexe à démêler.
A ce titre, le sentiment de vivre dans un territoire délaissé des pouvoirs publics est la forme de fragilité qui se cumule le plus avec d’autres comme la pauvreté, une mauvaise santé ou des problèmes de logement. En termes de politiques sociales, ces résultats montrent qu’il serait ainsi préférable de chercher à avoir une vision transversale des personnes plutôt que d’aborder les problématiques séparément les uns des autres.