De l’utilité de créer une opinion publique associative

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De l'utilité de créer une opinion publique associative

Le Monde daté du 5 septembre nous informe qu’un laboratoire privé - le CERPHI - vient de
rendre public les résultats de sa première enquête sur l’opinion des responsables associatifs
sous le titre « le surprenant optimisme des responsables associatifs ».

Sans contester l’outil en tant que tel construit très certainement selon les lois du genre mais
perfectible nous prévient t-on (le panel de 1236 personnes dites représentatives d’un million
d’associations de natures et de structures très variés), on est en droit de s’interroger sur la
déclaration du directeur scientifique du CERPHI qui assure sans vergogne que « beaucoup de
personnes s’exprimaient au nom du secteur associatif, mais on ne savait pas vraiment ce que
ressentaient les responsables d’associations eux-mêmes ».

65% des responsables associatifs interrogés considèrent que leur association est en mesure de
remplir ses missions. Un sondage d’opinion révèle enfin la quotidienneté de l’engagement
militant de plusieurs millions de responsables bénévoles, hommes et femmes, dans leur projet
associatif. Est-ce une surprise ? Cette évidence de la vitalité et du volontarisme de
l’engagement associatif mériterait néanmoins d’être nuancée à l’aune du biais introduit par
cette question introspective du responsable sur son organisation, un effet d’auto valorisation
bien connu de l’enquête d’opinion nous rappelle le sociologue Roger Sue en préface de cette
étude. Le baromètre ainsi constitué par ce sondage annuel produit inévitablement une
individualisation de l’opinion associative là où les associations ont construit un mouvement
collectif, organisé en fédérations, coordinations, réseaux, par secteurs et affinités, autant de
réelles opinions publiques au sens politique cette fois.

67% des responsables associatifs interrogés déclarent que l’exercice de leurs missions est de
plus en plus difficile. Ce constat récurrent depuis plusieurs années a conduit les responsables
associatifs à demander des formations pour tous les administrateurs bénévoles qui doivent
faire face à l’évolution et à l’augmentation des missions de gestion, de direction et de
relations aux pouvoirs publics de plus en plus complexe.

Que seulement 50% pourtant déclarent ne pas disposer de moyens financiers suffisants ne
peut constituer une surprise si l’on considère que le monde associatif est très largement
composé d’associations locales animées par des bénévoles et que, par ailleurs, sur le million
d’associations environ 150 000 concentrent effectivement les ressources humaines salariées
et les budgets. Dans ces conditions, il est plutôt surprenant de constater que 50% des
associations françaises disent manquer de moyens financiers... Le sondage produit là son
effet le plus pervers : parler pour la généralité de situations fort différentes qui nécessiteraient
une connaissance statistique officielle et objective (états de l’emploi salarié, du travail
bénévole, des ressources financières etc.). C’est précisément ce que nous demandons aux
pouvoirs publics depuis des années.

L’outil du sondage a son utilité dans un cadre scientifique clarifié, il permet notamment de
montrer régulièrement l’attachement des français à cette forme première aujourd’hui d’action
collective. Cependant, en aucun cas, la construction et l’interprétation de cette « opinion des
responsables associatifs » ne doit affaiblir plus encore le monde associatif organisé, dans ses
fonctions représentatives, alors que les pouvoirs publics successifs ont reconnu leur
importance dans l’organisation de la République.

Nous revendiquons le droit de parler au nom des 400 000 associations du mouvement
associatif organisé au travers de nos organisations fédérales dans un cadre démocratique et
collectif. Mais parce que nous sommes souvent « invisibles » aux yeux des faiseurs
d’opinions, la campagne nationale que nous venons de lancer à l’occasion de l’année
électorale à venir s’intitulera justement « 2007-2012 : que serait la vie sans les
associations ? ».

Jacques HENRARD,
Président de la Conférence permanente des coordinations associatives

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