En 2002, j’étais travailleur social au SAMU social de Paris. Lors d’une maraude, j’ai croisé un homme sans-abri dormant sur le trottoir, attaché à son fauteuil roulant pour ne pas se le faire voler. Bien qu’il accepte la proposition d’hébergement, la régulation du 115 interdit la prise en charge des personnes à mobilité réduite, car le véhicule n’était pas adapté ni assuré. Face à cet homme, j’ai alors ressenti toute la détresse et la souffrance d’une personne sans-abri qui incarnait « l’exclu parmi les exlus », selon la fameuse expression consacrée par l’urgence sociale.
Lorsque la FIRAH lance en 2018 un appel à projets de recherche « Handicap et grande précarité », une équipe de recherche se crée pour mesurer si les déficiences motrices et/ou sensorielles sont des freins à l’accès aux dispositifs pour les personnes sans-abri. Ce texte restitue la première partie de cette recherche qui s’est construite sur le parcours de 30 personnes sans-abri interrogées, qui présentaient des déficiences motrices et/ou sensorielles et fréquentaient l’urgence sociale. Les résultats présentés fondent l’existence d’un processus de non-recours. D’autres étapes de la recherche ont précisé les raisons précises et les solutions possibles, sans que nous les reprenions ici.