Parmi les nouvelles mesures restrictives, il était désormais exigé le certificat médical OMI, pièce remise à l’occasion de la procédure du regroupement familial, pour les enfants à charge d’un allocataire étranger. Aucun des gouvernements suivants ne reviendra sur cette mesure.
Comme par ailleurs, le regroupement familial a été rendu de plus en plus difficile au gré des réformes successives de la législation sur les étrangers, des milliers d’enfants et de parents ont continué à mettre en œuvre leur droit fondamental à vivre ensemble et, très concrètement, se rejoignent en utilisant les transports existant. Ces milliers d’enfants venus en dehors de la procédure du regroupement familial sont durablement privés des prestations familiales, avec des conséquences particulièrement graves pour eux-mêmes et leur famille mais aussi du point de vue de la cohésion sociale.
Un long combat juridique a été mené par les étrangers et les associations contre cette exigence abusive au regard du principe d’égalité et en violation de nombreux textes internationaux ratifiés par la France.
La Cour de Cassation, en assemblée plénière, leur a donné raison dans un arrêt du 16 avril 2004 - et l’a confirmé dans d’autres arrêts - en suivant la seule lecture de la loi qui puisse être conforme à la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Selon la Cour, dès lors que le parent allocataire justifie d’un titre de séjour, l’exigence du certificat médical OMI est illégale et viole la CEDH. La Défenseure des enfants a adopté la même position, tant dans son rapport remis au comité de suivi des droits des enfants des Nations Unies en mai 2004, que dans une proposition de réforme adressée aux autorités le 9 juin 2004.
Durant les premiers mois, le gouvernement, la CNAF et les CAF ont joué la sourde oreille, refusant sciemment d’appliquer le droit et de verser les prestations familiales et les aides au logement.
Face à la pression, le gouvernement vient d’annoncer un nouveau décret. Ce texte n’est toutefois qu’une mesure alibi qui ne règle pas grand-chose et ne met pas du tout en conformité les textes réglementaires avec l’arrêt de la Cour de cassation. Si le nouveau décret ouvre désormais le droit aux prestations familiales également aux enfants qui produiront le « document de circulation pour étrangers mineurs », il laisse de côté tous les enfants qui, justement, ne seront pas en mesure de produire un tel document.
D’abord, tous ceux qui n’y ont pas droit (selon l’article L. 321-4 du code des étrangers, y ont droit les seuls mineurs qui à l’âge de 18 ans rempliront certaines conditions pour obtenir un titre de séjour : en pratique ce sont surtout les enfants arrivés en France avant l’âge de 13 ans - et même 10 ans pour les Algériens et Tunisiens).
Ensuite les enfants qui y ont droit mais qui ne parviendront pas à l’obtenir - ou après de très longs délais - en raison des pratiques restrictives de numerus clausus des préfectures.
Enfin et surtout, ne le demanderont pas les familles qui préfèreront éviter les représailles de la préfecture. Demander un tel document constitue un piège redoutable pour ces familles puisque, depuis la loi Sarkozy, les préfectures peuvent retirer le titre de séjour au parent qui « a fait venir (…) ses enfants en dehors du regroupement familial » (article L 431-3 du code des étrangers).
Face à la violation ouverte du droit par le gouvernement et les CAF, la plupart des familles étrangères vont donc devoir continuer à faire valoir leur droit devant le juge.
Pour les y aider, le GISTI publie une nouvelle note pratique (« Les enfants entrés hors regroupement familial ont droit aux prestations familiales ») avec les textes applicables et des modèles de recours afin que les enfants étrangers obtiennent les prestations familiales, en toute égalité avec les enfants de ressortissants français ou européens.
Un recours est également déposé devant le Conseil d’Etat contre les textes qui continuent d’exiger ce certificat médical OMI.
Le GISTI appelle l’ensemble des personnes soucieuses de l’Etat de droit à se mobiliser dans cette campagne pour l’égalité des droits pour les enfants étrangers.