La torture n’accepte aucune exception et ne peut en aucun cas être légitimée.
Il est inacceptable qu’encore au XXIème siècle, une pratique aussi cruelle qu’inefficace soit observée dans plus d’un pays sur deux, y compris dans des Etats soi-disant démocratiques.
Le Centre Primo Levi, qui accueille et soigne chaque année plus de 350 personnes victimes de torture réfugiées en France, rappelle que la pratique de la torture est absolument condamnée par la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention de l’ONU contre la torture, ratifiée par les Etats-Unis en 1994, par le Royaume-Uni en 1988, etc.
Si la condamnation de cette pratique est l’un des rares sujets à faire – au moins dans les textes – l’unanimité dans le monde, ça n’est pas pour rien. « La torture est une pratique intentionnellement destructrice de l’individu, explique Sibel Agrali, directrice du centre de soins Primo Levi. Elle vise à réduire l’être humain à l’état d’objet ; à partir de là, l’imagination du tortionnaire n’a plus de limites. Et la victime en sort avec des séquelles psychiques et physiques profondes à vie ».
Depuis 2001, le tabou associé à la torture a changé. Selon l’image qui a commencé à être véhiculée notamment par certains films et séries, elle est progressivement devenue acceptable, sous couvert de protéger l’ordre établi. Pourtant, la torture n’a jamais fait ses preuves. Dernier exemple en date, le rapport de la commission d’enquête du Sénat américain (un sévère coup porté au film Zero Dark Thirty, censé être une reconstitution fidèle des dix années de la traque de Ben Laden et largement accusé de banaliser et de justifier la torture, cf CP du Centre Primo Levi).
Contrairement aux idées reçues, le but réel de la torture n’est pas de faire parler, mais de faire taire. Un grand nombre d’arguments le démontrent : préparation d’ « aveux » à l’avance par les tortionnaires, faux renseignements prévus par les opposants en cas d’arrestation, terreur exercée sur le corps et l’esprit de la victime, rendant peu fiables les renseignements arrachés.
Non seulement la torture ne permet pas d’obtenir des informations, mais elle entraîne en plus l’inverse de l’effet escompté sur les organisations cibles : selon l’universitaire Jean-Pierre Filiu, « les images de Guantanamo ont grandement facilité le recrutement et la propagande d’Al Qaeda. L’archipel de la torture a servi directement le renforcement de son ennemi désigné »*.
* Article « L’archipel de la torture : les leçons du rapport du Sénat américain » paru le 11 décembre 2014 sur Rue89