Il est vrai qu’en ce lundi post-élections européennes, l’esprit aux jeux de mots et aux envolées lyriques n’est pas là. D’où un titre d’édito un peu pâlichon... Ce n’est pas la place de parler des scores des élections européennes, mais quand même. On ne peut se satisfaire, en tant que citoyens, collectifs et progressistes, d’une instance parlementaire élue par la moitié du corps électoral. Surtout quand ce corps prend autant de décisions du quotidien et de l’économique. Que va devenir le statut de mutuelle européenne qui avait bien avancée sous l’ancienne législature ? Rien ne dit que cela sera stoppé, rien ne dit le contraire, l’Europe possède ses propres ressources. Malgré tout, on sent bien que le futur est moins sur la solidarité étendue que sur un nombrilisme protecteur.
Commençons par le satisfecit du Gouvernement sur l’adoption de la loi sur l’ESS "L’Economie sociale et solidaire reconnue comme un acteur majeur de l’économie et de l’emploi sur les territoires". Ce communiqué de la Ministre Valérie Fourneyron après l’adoption pointe plusieurs avancées non négligeables apportées par le projet de loi : les PTCE en sont un premier exemple. Ces "labos de l’ESS" comme les cite le communiqué (on notera le clin d’oeil vers le think tank éponyme) " bénéficieront désormais d"un cadre législatif clair et pourront être soutenus par l"Etat. Ceci leur permettra de franchir un saut quantitatif et qualitatif, en passant d"initiatives dispersées et de petite ampleur à un modèle économique générateur d"activités et d"emplois dans les territoires, quels que soient les secteurs et filières concernées". Nous l’espérons, nous aspirons à ce que ce voeu se transforme en réalité ! On notera également un statut et des pouvoirs renforcés pour les CRES. Une reconnaissance d"utilité publique qui permettra d’asseoir encore un peu plus la reconnaissance territoriale, mais surtout, un "pouvoir de police" sur les entreprises qui ne suivraient pas les règles de l’ESS, définies par la loi. Tout cela reste à être validé cette semaine par le Sénat. Et mis en musique ensuite par les décrets d’application. Bref, encore de la négociation à venir. Et la CFES ? Pas de nouvelles (La recherche sur un moteur de recherche laisse dubitatif).
La semaine dernière sont sortis deux baromètres majeurs des activités que nous relatons : celui sur les finances solidaires et celui sur le bénévolat. Si on doit résumer (imparfaitement) les résultats 2013 de la finance solidaire : 6,02 milliards d"€ déposés sur des produits d"épargne solidaire ont généré 1,02 milliard d"€ de financement solidaire, pour soutenir des projets à vocation sociale et/ou environnementale. Et cela rien qu’en mutualisant des énergies individuelles ! Même ressort sur le bénévolat tant l’énergie individuelle de plusieurs peut porter des projets gigantesques ! Mais la "France bénévole" met aussi en exergue la transformation du bénévolat, et entre autres, la difficulté (tant de fois constatée) pour les associations plus historiques d’intégrer l’innovation des jeunes générations bénévoles.
Cette "attention aux autres" est le fil rouge de la Croix Rouge depuis 150 ans ! "Guerres 14/18 et 39/45, lutte contre la tuberculose, rupture du barrage de Malpasset, guerre d"Indochine, d"Algérie, mai 68, guerre du Kosovo, crash du Concorde, tsunami de 2004, séisme en Haïti, tempête Xynthia, ou plus récemment le typhon aux Philippines et le virus Ebola en Guinée", elle est présente aux côtés de ceux qui souffrent. Alors, n’oublions pas leurs journées nationales, rendez-vous plus que jamais crucial "pour mobiliser le plus grand nombre et recueillir un maximum de dons !"
Autre bilan mais beaucoup moins réjouissant ! Le bilan hivernal du baromètre 115 sur 37 départements et Paris... "Sur les 37 départements étudiés, 61% des demandes sont restées sans solution entre le 1er novembre et le 31 mars 2014 (pour 59 % l"hiver dernier), soit une légère aggravation de la situation, dans un contexte de progression de 10 % des demandes sur un an. Sur Paris la situation est relativement plus favorable, avec 45 % des demandes non satisfaites". Les temps sont difficiles, mais peut on comprendre l’aggravation des accueils pour les plus vulnérables d’entre nous dans la période la plus climatiquement difficile ? Alors que 7% de logements sont vacants sur le territoire !
Dans le projet de loi adoptée par les députés, l’extension du champ de la co-assurance réjouit la FNMF qui, par son communiqué, explicite la raison : pouvoir apporter des éléments innovants en réponse à des besoins (surtout) collectifs, tout en partageant le risque à plusieurs. En lien direct, entre autres, avec l’ANI, on peut imaginer que le terrain mutualiste se dote d’une arme efficace, en plus, pour jouer à armes égales avec les groupes capitalistes.
On parle beaucoup des SCOP depuis 2 ans. Portées par le Gouvernement, mises en lumière par le projet de loi, brandies par les salariés des entreprises en difficulté, les SCOP sont sous le feu de la rampe. L’ANACT s’est posée la question des conséquences d’un management particulier des salariés associés. L’étude, même si il faut mettre des attentions vu le peu de chiffres spécifiques, montre un réel effet positif de ce statut dans la condition de travail du salarié (surtout sur l’articulation vie privée, vie professionnelle). Ceci dit, l’étude montre également "l’insécurité générée par le statut d’associé, le flou sur l’organisation dans les plus petites structures ou une certaine tendance à l’isomorphisme dans les plus grandes", bref, le revers de la médaille. Mieux vaut être inquiet de l’avenir en ayant possibilité d’orienter réellement les décisions ou inquiet de l’avenir en le subissant totalement ?
Ressources Solidaires a été interrogé par 20 minutes pour apporter un éclairage sur l’emploi dans l’ESS. Celles et ceux qui ont fait nos ateliers et/ou nous connaissent savent que notre présentation du marché de l’emploi dans l’ESS est précise, complète et sans langue de bois, nous ne suivons pas les sirènes du marketing actuel. Oui, travailler dans l’ESS est passionnant, non, ce n’est pas "le monde des petites fleurs et des oiseaux qui chantent". Et vouloir y travailler mérite objectivité et respect des parties concernées. En tout cas, cet article, même court (et avec une ou deux interprétations de nos propos) a suscité des commentaires et des retours.
La deuxième partie de notre titre faisait écho à l’augmentation des CDD sur le marché de l’emploi. Sur 2013, la part a augmenté pour atteindre un record... Surtout dans le tertiaire... Une interprétation plausible serait un manque de confiance dans l’avenir. Avec comme conséquence un renforcement de l’humain comme variable d’ajustement.
Bonne lecture, bonne semaine !