Avec 5097 votes en sa faveur, le groupe énergétique français GDF Suez se classe au deuxième rang du Public Eye Awards 2010 récompensant les entreprises les plus irresponsables du monde sur les plans social et environnemental.
GDF se distingue pour sa responsabilité dans le consortium de construction du barrage de Jirau sur la rivière Madeira, en Amazonie brésilienne, un projet qui aura de lourdes conséquences socio-environnementales.
Le barrage de Jirau, en cours de construction à 150 km de la ville de Porto Velho, dans l’Etat du Rondônia, promet une capacité de 3 450 megawatts. Il constitue l’un des projets les plus grands et les plus coûteux du ‘Programme de croissance accélérée’ du Brésil ; il menace gravement la biodiversité de la région, les populations riveraines du Brésil, de Bolivie et du Pérou ainsi que plusieurs groupes d’Indiens isolés.
Le public était appelé à voter en ligne du 14 au 26 janvier derniers. GDF qui a reçu près de deux fois plus de votes que la Banque royale du Canada se trouve en deuxième position derrière le groupe pharmaceutique Roche qui a obtenu 5723 votes. Trois autres entreprises et organisations étaient sur les rangs : Arcellor Mittal, Farner, et le Comité olympique international. Le prix sera remis aujourd’hui à Davos, Suisse.
Parmi les violations des droits humains occasionnées par le barrage de Jirau, figurent l’absence de consentement libre, préalable et informé des communautés indigènes locales ainsi que la non prise en compte de la présence, dans la région, de groupes d’Indiens isolés extrêmement vulnérables aux contacts extérieurs et qui seront directement affectés par les impacts du projet.
Fiona Watson, directrice des campagnes au siège de Survival International, a déclaré : ‘Si la construction des barrages de la Madeira n’est pas immédiatement stoppée, les Indiens isolés qui vivent dans la région et qui sont extrêmement vulnérables en subiront les graves conséquences. Leur territoire n’étant pas protégé, ils seront inévitablement exposés à des maladies et à de violents conflits qui compromettront leur survie même’.
Des chercheurs ont également alerté sur les graves conséquences environnementales du projet, dont la déforestation et l’extinction probable de plusieurs espèces de poissons.
Lettre à GDF Suez
Une coalition d’organisations brésiliennes et internationales a récemment adressé une lettre à M. Gérard Mestrallet, président de GDF Suez, exhortant sa compagnie à suspendre immédiatement la construction du barrage de Jirau et à prendre des mesures d’urgence pour résorber les impacts sociaux et environnementaux déjà générés par le chantier.
‘GDF Suez et ses filiales ont fait preuve d’un manque de ‘précautions raisonnables’ au cours des phases de planification et de construction du barrage de Jirau, ainsi que d’un flagrant mépris des droits humains et de la protection de l’environnement qui relèvent de la responsabilité juridique et morale de l’entreprise’ dénoncent les signataires de la lettre.
Selon Jean-Patrick Razon, directeur de Survival International France : ‘Il est scandaleux que le gouvernement français utilise des fonds publics pour financer une entreprise honteusement responsable de la destruction d’une importante rivière amazonienne et d’une région d’une exceptionnelle diversité biologique et socio-culturelle. En outre, ce projet menace gravement les groupes d’Indiens isolés – les peuples les plus vulnérables de la planète – qui vivent dans la région et dont la survie se situe au premier rang de nos préoccupations car ils seront chassés de leurs terres et exposés à des maladies contre lesquelles ils n’ont aucune immunité’.
Etant donné le rôle majeur joué par le gouvernement français en tant qu’actionnaire principal de GDF Suez (36,6 %), une copie de la lettre a été adressée au président Sarkozy ainsi qu’aux ministres concernés les exhortant ‘à s’assurer que les questions et les recommandations formulées par les organisations signataires recevront une réponse adéquate de la part des plus hauts responsables de l’administration de la compagnie’.
Parmi les 16 organisations et réseaux de la société civile signataires de la lettre figurent : Amigos da Terra – Amazônia Brasileira, Associação de Defensa Etnoambiental Kanindé, Amazon Watch, Movimento dos Atingidos por Barragens (Mouvement des peuples affectés par les barrages) – MAB, Survival International, Greenpeace, Grupo de Trabalho Amazônico – GTA, Sherpa, Fondation France Libertés – Danielle Mitterrand.