Depuis quelques temps, la vie n’est vraiment plus possible. Mon voisin ne sait plus qui appeler. Les Assedic ne lui sont plus versés et il n’a plus de revenus. SOS Amitié, SOS Médecins ne répondent plus ; ses colis ne sont plus distribués à la Banque Alimentaire ; les Restos du Coeur sont fermés et il ne trouve plus de vêtements au Secours Populaire ni au Secours Catholique.
Sur le quartier, la vie s’est arrêtée : plus de soutien scolaire après l’école, la petite n’est plus accueillie à la crèche parentale (il n’y a plus de place à la crèche municipale), plus d’émissions sur la radio associative, plus de journal de quartier, ni d’entretien des cages d’escalier par la régie de quartier, plus d’animateur pour encadrer l’espace jeunes. Même le comité de quartier ne lutte plus contre l’implantation d’une usine chimique en faveur de l’aménagement des pistes cyclables.
Les activités organisées par le club de foot et de karaté sont suspendues et la MJC comme le Centre Social ont fermé. Si au moins je pouvais me détendre au yoga ou à la relaxation ! Seuls le théâtre municipal est toujours ouvert, mais il a de plus en plus de difficultés à trouver des spectacles. Mon fils ne décolère pas : plus de concerts de rock. Ma fille ne peut plus chanter à la chorale. Quant à moi, la troupe de théâtre amateur où je m’essayais à la comédie a tiré le rideau. Mon mari est bien sûr plus disponible : finis les concours de pétanque et les réunions de généalogie, finis aussi les matchs de foot du dimanche. Mais il est d’une humeur massacrante : il ne sait plus quoi faire après le travail et le week-end il tourne en rond et s’est remis à fumer, scotché à la télé. Plus sérieusement, il est impossible de trouver un établissement spécialisé ouvert pour accueillir ma petite nièce, handicapée moteur. De plus, la recherche médicale sur sa maladie a cessé, faute de dons récoltés. Mon père ne sort plus. Il est handicapé et le taxi associatif ne vient plus le chercher pour rejoindre le club du 3ème âge (qui de toutes façons ne fonctionne pas). Comme le portage de ses repas ne se fait plus, nous nous relayons pour lui préparer à manger. Impossible de trouver un logement universitaire pour ma fille aînée, ni un hébergement au foyer de jeunes travailleurs pour mon fils. D’ailleurs, il ne pourra pas faire son apprentissage d’ébénistes car le centre de formation est fermé. Il est donc allé à la Mission Locale pour trouver un stage : il a trouvé porte close.
Chez mes cousins bretons, ce n’est pas mieux... Il n’y a pratiquement plus personne pour aller ramasser le pétrole sur les plages et lors des tempêtes, pas de sauvetage en mer. Ils ont perdu leur chien et le refuge de la SPA est fermé. Les berges de la rivière ne sont plus nettoyées par l’entreprise d’insertion et les arbres abattus par la tempête n’ont pas été enlevés. Le clocher du village et le lavoir s’effondrent, l’association de sauvegarde du patrimoine ayant cessé de s’en préoccuper. Plus grave encore, certains agriculteurs ont du arrêter leur activité, faute de pouvoir embaucher du personnel avec le groupement d’employeurs. Une ferme a été entièrement détruite par les flammes en l’absence d’intervention de pompiers bénévoles. La grand-mère n’a plus personne pour l’aider à domicile dans ses tâches quotidiennes. Quant aux maisons de retraite, on n’en parle pas... Le bibliobus comme le cinéma itinérant ne passent plus. Et il y a belle lurette qu’on n’a plus entendu la fanfare ni dansé au bal du village. C’est comme ça depuis que les associations se sont arrêtées...
Arlette Burgy-Poiffaut/Marie Rouxel
Alerte ! Et si les associations se mettaient en grève ?
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