Au lieu de faire un mauvais procès à ceux qui sauvegardent et diffusent la biodiversité, il
faut changer la réglementation qui la restreint au seul profit de l’industrie semencière, et
contre l’autonomie des paysans et la souveraineté alimentaire des populations
Pour imposer ses semences, l’industrie semencière doit aussi interdire tout ce qui permet aux
paysans de rester autonomes. Aujourd’hui, 80% des semences potagères et 100% des maïs
qu’elle vend sont des variétés hybrides dont la production s’effondre lorsqu’elles sont
ressemées. Elle oblige ainsi les paysans à racheter chaque année ses semences, en attendant de
généraliser cette dépendance avec les OGM brevetés.
Kokopelli diffuse des semences de plus de mille variétés potagères dites anciennes, la plupart
issues de sélections paysannes, toutes permettant de ressemer le grain récolté. Avec d’autres
associations, des petites entreprises et des milliers de bénévoles, ses adhérents contribuent
ainsi à la sauvegarde de la biodiversité disparue des catalogues commerciaux et à permettre sa
culture, complément indispensable à la conservation en chambres froides réalisées par les
pouvoirs publics et les semenciers.
Pour commercialiser une semence, il faut inscrire la variété concernée sur le catalogue
officiel, en payant pour chaque variété des frais inaccessibles quand on diffuse plus de mille
variétés, parfois en très petite quantité. De plus, seules les variétés homogènes et stables,
sélectionnées pour pousser à grands renforts d’engrais et de pesticides, ont accès à
ce catalogue. Les variétés anciennes et paysannes restent capables de s’adapter à la diversité
des terroirs et à la variabilité de conditions naturelles de culture sans obliger le paysan à
acheter le paquet complet semences/engrais/pesticides. Elles sont ainsi exclues de tout cadre
juridique adapté à leurs spécificités, elles sont « hors de la loi ». C’est parce que l’association
Kokopelli refuse ces lois iniques que les semenciers veulent faire un exemple en la poussant
vers la faillite par d’énormes condamnations financières.
Pourtant, la Commission Européenne propose depuis 1998 de faire évoluer ces lois, en
reconnaissant dans ces attendus qu’il est nécessaire de « stopper l’érosion génétique et
d’enlever les verrous légaux qui freinent la protection et le développement de la diversité des
cultures » afin de permettre « la commercialisation et l’utilisation durable des variétés qui ont
un intérêt limité ou local et qui ne peuvent donc pas être admises dans le catalogue
commun ». L’industrie semencière s’oppose à cette initiative et tente de la réduire à une
déclaration de principe sans portée pratique : est-ce pour empêcher que cette évolution
réglementaire légalise le travail d’associations comme Kokopelli que les firmes se lancent
aujourd’hui dans ce procès ?
Cette plainte n’est pas isolée. Depuis quelques temps, de nombreux contrôles s’abattent sur les
paysans qui conservent et sélectionnent leurs semences pour qu’elles puissent pousser en
conditions naturelles. Pour faire voter en 2006 les lois de coexistence autorisant
définitivement les OGM brevetés qui contamineront inévitablement tous les champs et toutes
les variétés paysannes, la principale multinationale semencière, Monsanto, tente fin novembre
2005 de mettre à genou un de ses principaux opposants, la Confédération Paysanne, en faisant
saisir ses comptes. Dans un domaine très proche, le Tribunal de Nîmes condamne le 29
novembre à de fortes amendes une petite coopérative gardoise, Biotope, dont les adhérents
vendent des plantes sauvages à valeur condimentaire ou médicinale : seule l’industrie
pharmaceutique ou les fabricants de nouveaux aliments auraient le droit de commercialiser
des plantes aussi communes et d’utilisation aussi traditionnelle que la prêle ou le bleuet ! Ce
n’est pas la Confédération paysanne ou Biotope qu’il faut condamner, mais l’industrie
semencière qui dissémine dans nos champs ses gènes brevetés, qui prend la biodiversité et nos
estomacs pour son laboratoire d’essai et qui camoufle les résultats de recherche mettant en
doute la sécurité sanitaire de ses OGM.
Il est inadmissible de poursuivre Kokopelli tant que les lois ne permettent pas de faire le
travail d’utilité publique qu’elle réalise dans des conditions juridiques adaptées. C’est
l’industrie semencière qui s’est rendue coupable de concurrence déloyale et de
tromperie du consommateur, en prétendant que seules ses variétés seraient bonnes à
cultiver. Ce sont les lois sur les semences qu’il faut changer afin que les paysans et les
jardiniers puissent ressemer le grain récolté, conserver, échanger et sélectionner eux mêmes
les semences qui leur permettent de rester indépendants des pesticides, des
hybrides stériles et des OGM.
Cela fait un moment que je cherche des graines souches. Aussi, je suis très heureuse qu’une association comme Kokopelli existe et c’est important de tout mettre en oeuvre pour faire du bruit autour de cette affaire de procès. Personnellement, je suis tombée dessus par hasard mais je leur souhaite beaucoup de courage. Je vais contacter la partie adverse de Kokopelli pour leur signifier ce que je pense.
De plus, je suis institutrice et j’étais étonnée que les graines des fruits et légumes apportées par les gamins fassent de piètres plantations. Maintenant, avec le système des hybrides, je comprends pourquoi... Aussi, j’en parle à tous mes collègues étonnés qui découvrent ces deux catégories : les plantes hybrides, qui ne se renouvellent pratiquement pas, et les plantes souches, qui repoussent. Je pense que quand le grand public comprendra l’anarque des semensiers, ils iront voir ailleurs (chez Kokopelli par exemple)..