Travail détaché : le cocktail infernal

Au pic de production, 7000 personnes travaillent dans les chantiers, dont 2000 salariés détachés venus d'Europe, selon la direction.  - Marie Viennot
Au pic de production, 7000 personnes travaillent dans les chantiers, dont 2000 salariés détachés venus d'Europe, selon la direction. - Marie Viennot
Au pic de production, 7000 personnes travaillent dans les chantiers, dont 2000 salariés détachés venus d'Europe, selon la direction. - Marie Viennot
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La directive européenne de 1996 sur le travail détaché permet à un employé travaillant dans un Etat membre de l'UE d'être détaché temporairement pour travailler dans un autre et d'avoir les mêmes droits que les travailleurs du pays d'accueil. Dans les faits, la concurrence sociale bat son plein.

Avec
  • Gilles Savary Ancien député socialiste de Gironde, rapporteur de la loi de 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale
  • Séverine Picard Juriste à la confédération des syndicats européens (CES).

Cela fait plus d’un an et demi que les discussions sont en cours. Lundi 23 octobre, les ministres européens du Travail se retrouvent à Luxembourg, et ils espèrent parvenir enfin à un accord. Le sujet de la discorde : les travailleurs détaillés. Un dossier complexe dans lequel chaque Etat défend ses intérêts.

Pour la France, par exemple, il s’agit d’éviter le dumping social et de lutter contre la fraude, et Emmanuel Macron, au nom d’une « Europe qui protège », a réclamé que le détachement soit limité à 1 an maximum. Ce faisant, le président français s’est mis à dos la Pologne et la Hongrie. Pour les pays d’Europe de l’Est, pas question de voir entravée la libre circulation des travailleurs ni la libre concurrence. Quant à l’Espagne, elle mise sur une dérogation pour le secteur des transports.

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Il faudra bien parvenir à un compromis : la directive européenne de 1996 est devenue obsolète. Rédigée avant l’entrée dans l’Union des pays issus du bloc soviétique, elle ne prend pas en compte les écarts de salaires, qui peuvent varier aujourd’hui de 1 à 10. Le texte en projet institue donc le principe d’une « même rémunération » pour un « même travail » sur un « même lieu de travail ».

Difficile d’estimer le nombre de travailleurs détachés. La direction générale du travail donne aujourd'hui le chiffre de 100 000 déclarations de détachement (hors Transports), et elle ne fait plus d'estimation des non déclarations, mais la députée européenne Morin Chartier qui porte la révision de la directive au Parlement Européen, dit régulièrement qu'en France il y a 400 000 travailleurs détachés. Ils seraient un peu plus de 400.000 en Allemagne. Au total, ils ne représentent qu’1 à 2% de la population active. Mais la multiplication des dérives et des fraudes déstabilise certains secteurs. Elle alimente aussi la xénophobie.

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