Transparence des industries extractives : avancée à Paris

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Transparence des industries extractives : avancée à Paris

Une conférence sur la transparence des industries extractives souligne le rôle essentiel d’une loi contraignante en complément de démarches volontaires

Alors que la conférence internationale de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) s’est clôturée hier soir à Paris, Oxfam considère comme encourageant l’engagement de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni en faveur d’une réglementation contraignant les entreprises pétrolières, gazières et minières à publier les paiements versés dans les pays riches en ressources minières.

Pour Luc Lamprière, directeur d’Oxfam France : « Nous savons que l’approche volontaire pour plus de transparence dans le secteur extractif peut fonctionner soutenue par une forte volonté politique. Mais des règles de transparence supplémentaires imposées aux entreprises, telles que la loi Dodd-Frank récemment votée aux Etats Unis, sont nécessaires pour s’assurer qu’à travers le monde, les citoyens aient entre leurs mains les bonnes informations, en particulier dans les pays n’ayant pas encore rejoint l’ITIE ».

La conférence de l’ITIE a réuni des gouvernements, des entreprises et des ONG pour faire le point sur ce processus unique de dialogue entre les entreprises, les gouvernements et la société civile, lancé en 2003.

" Le soutien des gouvernements français, britannique et allemand à une régulation européenne contraignante est une victoire pour nos demandes et nous espérons que d’ici à la fin de l’année, des exigences de reporting sur les bourses européennes complètent l’exigence de transparence déjà adoptée aux Etats Unis » ajoute Luc Lamprière.

Pour Ian Gary, conseiller sur les industries extractives à Oxfam America, « L’autorité américaine des marchés devrait se prononcer rapidement sur des modalité ambitieuses d’application de la loi Dodd-Frank. Les régulateurs européens suivent de près ce processus et souhaitent harmoniser les exigences de reporting sur les marchés boursiers européens. La loi américaine couvre déjà un grand nombre d’entreprises établies aux États-Unis, en Europe et dans des pays comme la Chine, le Brésil et l’Afrique du Sud. L’extension progressive de cette obligation de reporting responsabilisera d’autres entreprises à travers le monde et réduira ainsi les distorsions de concurrence liées à la transparence, souvent prétextés par les entreprises ».

On observe depuis peu un soutien croissant des investisseurs qui considèrent que cette mesure pourrait contribuer à leur travail d’évaluation des risques liés aux activités de ce secteur.

« Aux Etats-Unis, certains gestionnaires d’actifs et fonds de pension représentant au total plus de 1,2 mille milliard de dollars d’actifs ont écrit à la SEC pour exprimer leur solide soutien à une mise en œuvre exigeante de la loi américaine. Ces investisseurs considèrent comme très importante cette information pour prendre leurs décisions » précise Ian Gary.

Pour Maylis Labusquière, d’Oxfam France « Cette nouvelle loi américaine démontre que le reporting financier pays par pays est possible. Etendre cette obligation à d’autres secteurs, en rendant public des informations supplémentaires, sera essentiel pour lutter contre les flux financiers illicites, l’évasion fiscale et les paradis fiscaux qui privent les gouvernements de ressources pour lutter contre la pauvreté ».

Oxfam France espère que ces nouvelles exigences créent un précédent pour travailler à l’instauration d’un reporting pays par pays au sujet des impôts payés par les entreprises multinationales dans tous les secteurs.

Notes :

Un milliard et demi de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour dans les 50 pays les plus riches en ressources naturelles.

11 pays ont été à ce jour jugés comme ayant rempli les conditions minimums de transparence de l’ITIE, c’est-à-dire à avoir rendus publics les paiements versés par les entreprises minières, pétrolières et gazières, aussi bien que les sommes reçues du côté des gouvernements. Pour Oxfam, des obligations plus rigoureuses de publications sont nécessaires, notamment des données détaillées des paiements dans chaque pays, entreprise par entreprise, ainsi que la publication des contrats pour faire avancer le processus d’ITEI. La République Centrafricaine, la République Kirghize, le Niger, le Nigeria, la Norvège et le Yémen ont rejoint l’Azerbaïdjan, le Ghana, le Libéria, la Mongolie et le Timor oriental comme « Conformes à l’ITIE. »

Un des passages de la loi Dodd-Frank sur la réforme de Wall Street signée l’été dernier par le Président Obama exige de l’ensemble des entreprises américaines et étrangères cotées en bourse aux Etats -Unis de publier chaque année les différents paiements qu’elles versent dans chaque pays où elles opèrent, projet par projet. Les modalités finales d’application de cette mesure inédite devraient être décidées en avril par l’autorité américaine des marchés financiers (SEC). 27 des 30 compagnies pétrolières et gazières les plus importantes au monde auront à appliquer cette mesure, notamment Total, BP et Shell et d’autres.

- Note d’Oxfam France sur la loi Dodd-Frank et les opportunités politiques au niveau européen
- Toutes les informations sur les entreprises impliquées par la loi Dodd-Frank sur la réforme de Wall Street, ainsi que le détail de la loi, sont disponibles à cette adresse (en anglais)
- Site internet en français de la campagne “Publiez ce que vous payez”
- Site internet en français de la cinquième conférence mondiale de l’ITIE
- Les différents rapports envoyés à la SEC avant le 2 mars sont disponibles à cette adresse (en anglais)

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