Pour une ESS sans "limites"

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Pour une ESS sans "limites"

Le Conseil des ministres du 11 janvier a entendu une communication de Madame Bachelot sur l’ESS. Le communiqué qui en est suivi ne manque pas de laisser perplexe. Pour l’essentiel il reprend des mesures déjà prises, des dispositifs déjà mis en oeuvre : les 100 millions du grand emprunt et le plan Jeun’ESS. Pour le reste il revient sur le travail fort honorable de Monsieur Vercamer et annonce une loi-cadre.

Palais de l’Elysée Et c’est là que l’on peut s’étonner. D’abord annoncer une loi-cadre à discuter avec les acteurs du champ à deux mois de la fin d’une mandature relève du vœux pieux, de l’effet d’annonce.
Avec l’intervention du Président de la République sur la Scop Seafrance, on est en pleine campagne électorale.

Ensuite l’objet de la loi-cadre : "faciliter la reconnaissance de l’ESS". Mais à ce qu’il semble, ce n’est pas une loi sur l’ESS qui imposera l’accès ses syndicats employeurs dans les instances de concertation et de négociations collectives ; le gouvernement était depuis longtemps en mesure d’engager au sein du ministère du Travail cette reconnaissance alors que les listes de l’AES avaient remporté près de 20% des suffrages employeurs aux dernières élections prud’homales et qu’aujourd’hui l’UPA évoque cette représentativité de l’ESS issue du vote.
Autre objet : "délimiter les frontières de cette économie". Les entreprises de l’Économie sociale sont de libre constitution, elles touchent tous les secteurs de l’activité économique et pas simplement "la finalité sociale" telle que visée dans le texte. Que veut dire en l’occurrence délimiter ? Leur assigner un territoire ? Des réserves ?

Dans la campagne électorale, il sera pour la première fois assez largement question de l’ESS (et ce communiqué s’inscrit dans ce cadre).
Nous nous en réjouissons.

Mais ce dont l’ESS a besoin ce n’est pas d’un encadrement, mais d’un libre espace pour son développement ; pour reprendre une expression qui n’est pas la sienne d’une "concurrence libre et non faussée" où sa prise en compte de l’utilité sociale et de la solidarité ne la pénalise pas par rapport à ses concurrents capitalistes ; où ses approches qualitatives et démocratiques ne soient pas sacrifiées aux règles comptables du moins disant et de la pénurie.

L’ESS n’est pas une économie subsidiaire, elle revendique toute sa place dans une économie plurielle. Si une crainte existe au regard de la concurrence, elle ne vient pas de l’ESS mais de certaines franges du patronat qui vont jusqu’à lui reprocher sa non distribution de dividendes.
La société bouge, de plus en plus de jeunes sont attirés par cette autre façon d’entreprendre. Hugues Sibille parle des "nouvelles frontières" de l’ESS. Ce n’est pas le moment de se faire imposer des limites.

Jean-Philippe Milesy, Délégué général de Rencontres sociales

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